https://drive.google.com/open?id=0B-p0lmjLtiXzTDRLNjVhaVJ5VDlmb0NKWC1UMG5GVHQ4b2pN
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Le TF rappelle d’abord le principe selon lequel le client d’un établissement bancaire a le droit d’obtenir, sur la base de sa relation contractuelle avec la banque, le versement de ses avoirs en espèces à la clôture de la relation bancaire, ce sans avoir à justifier au préalable de sa conformité fiscale. Le TF examine ensuite si, sur la base de la situation concrète de ces deux dossiers, les clients pouvaient se voir priver d’un tel droit.
Pour justifier de son refus de libérer les fonds en espèces, la banque a invoqué l’exigence de la garantie de l’activité irréprochable et plus particulièrement la Prise de position de la FINMA à propos des risques juridiques et de réputation dans le cadre des activités transfrontières qui implique que la banque procède à une analyse approfondie des risques présentés par des relations bancaires transfrontières et se dote de directives internes définissant des normes de comportement pour réduire ces risques. A l’appui de cet argument, la banque faisait référence à des directives internes – qu’elle n’a pas produit – lui faisant interdiction d’autoriser un prélèvement au comptant dans les cas d’espèce. Elle soutenait également qu’elle avait informé la FINMA de sa politique de gestion des risques. Le TF suit l’appréciation cantonale selon laquelle la banque n’a pas apporté la preuve de son analyse des risques ni produit ses directives internes et n’a donc pas réussi à démontrer que le paiement en espèces demandé serait contraire à sa politique de gestion des risques. Ainsi le Tribunal d’Appel n’avait pas besoin de décider si les directives internes en matière de gestion des risques juridiques et de réputation peuvent limiter ou totalement exclure le droit du client de retirer ses fonds en espèces à la fin d’une relation bancaire.
La banque soutenait par ailleurs qu’en donnant suite aux instructions du client, elle s’exposait à des poursuites pour violation du droit fiscal et pénal italien et prétendait qu’elle se trouverait ainsi dans un cas d’impossibilité subséquente d’exécuter son obligation au sens de l’article 119 du code des obligations. Le TF ne tranche pas la question et relève que dans la mesure où la banque n’a pas démontré que ces normes de droit étranger lui sont applicables et qu’elles lui feraient en outre interdiction d’exécuter les instructions du client, il n’a pas à approfondir cette question.
A l’invocation de l’article 19 de la loi fédérale sur le droit international privé par la banque qui considérait que des normes impératives de droit italien lui interdiraient de faire droit à la demande des clients, notre Haute Cour ne tranche pas non plus et se contente de relever à nouveau que la banque n’a pas suffisamment motivé en quoi ces normes lui seraient applicables.
Par ailleurs, la banque reprochait aux instances cantonales d’avoir ignoré les normes suisses anti-blanchiment et plus particulièrement l’article 6 de la loi sur le blanchiment d’argent en soutenant qu’en présence d’un retrait en espèces, elle était tenue de vérifier l’arrière plan économique de la transaction et que la clôture du compte, accompagnée d’un tel retrait, était inusuelle au sens de l’article 6 al.2 let a LBA. Le TF confirme à cet égard l’appréciation cantonale et relève que la banque omet d’expliquer pour quels motifs ces normes seraient applicables lorsque le client souhaite reprendre possession de ses fonds alors que la relation bancaire est vieille de plusieurs années, sans pour autant que la banque ait fait usage de ces dispositions auparavant.
Enfin, notre Haute Cour retient que le nouvel article 305 bis du code pénal n’entre en vigueur qu’en janvier 2016, que le droit pénal prévoit le principe de la non-rétroactivité et que la banque n’a pas démontré en quoi le seuil des CHF 300’000 prévu par cette disposition était atteint dans les cas d’espèce.
Ces deux décisions très attendues du TF ne tranchent pas la question de principe qui se pose dans ce type de dossier, à savoir si une banque est en droit de se prévaloir de ses directives internes en matière de gestion des risques ou d’une potentielle violation du droit étranger pour limiter ou même exclure les retraits en espèces de ses clients à l’occasion de la clôture d’un compte bancaire.
Reproduction autorisée avec la référence suivante: Stéphanie Hodara El Bez, Avoirs défiscalisés : Le TF permet le retrait en espèces , publié le: 14 Déc 2015 par le Centre de droit bancaire et financier, https://www.cdbf.ch/935/