J’ai “volé” 492.000 Euros à ceux qui nous volent le plus pour les dénoncer et construire des alternatives de société.
Nous traduisons ici le témoignage d’un activiste catalan de 32 ans qui raconte à la première personne comment il a décidé de lutter contre le pouvoir économique de la banque.
J’écris ces pages pour rendre public que j’ai exproprié 492.000 euros à 39 organismes bancaires à travers 68 opérations de crédit. En incluant les intérêts de retard, le chiffre actuel de la dette est de plus de 500.000 euros que je ne compte pas restituer. Il s’agit d’une action individuelle d’insoumission à la banque que j’ai menée à bien de manière préméditée pour dénoncer le système bancaire et pour destiner l’argent à des initiatives qui alertent de la crise du système que nous commençons à vivre et qui essayent de construire une alternative de société. Il s’agit d’une action étrangère à tout type de violence, que je revendique comme une nouvelle forme de désobéissance civile à la hauteur des temps qui courent. Quand le financement à la consommation et la spéculation sont dominants dans notre société, quoi de meilleur que voler à ceux qui nous volent et distribuer l’argent entre les groupes qui dénoncent cette situation et construisent des alternatives ? List of bank entities affected.
Comment ai-je pu obtenir tant d’argent sans propriétés ni avals bancaires ?
Après quelques recherches et essais, au printemps 2006, j’ai décidé faire avancer cette idée en faisant croire, selon le cas, aux diverses banques, caisses d’épargne et établissements financiers de crédit que je voulais rénover mon appartement ou acheter une voiture. Dans quelques cas, ce fut aussi par le biais d’une entreprise créée dans le but de justifier certains investissements comme l’achat de matériel audio-visuel pour une entreprise de production audiovisuel. L’avantage de demander un prêt pour une entreprise est que la dette, même s’il s’agit d’une entreprise unipersonnelle, n’apparaît pas dans ton historique de dette personnelle, de sorte que tu peux augmenter ton endettement indéfiniment sans que le CIRBE (système d’information sur les dettes de la banque d’Espagne) le détecte. Il existe d’autres manières de tromper le CIRBE que j’expliquerai à qui veuille effectuer une action dans un but semblable à la mienne. Ces prêts étaient sollicités sans aucune garantie d’autre personne ni d’aucune propriété, simplement avec ma signature. Avec une profession inventée et une bonne fausse fiche de salaire qui faisait croire que je gagnais largement pour accéder au financement. Le quid de la question est que les banques n’ont aucune manière de vérifier si une fiche de salaire que tu leur présentes est réelle ou non, pourvu que l’entreprise et la personne existent réellement. Il fallait aussi présenter les extraits bancaires adéquats, que j’obtenais en faisant circuler l’argent de comptes d’entreprise à des comptes personnels à travers de transferts de salaires pour simuler des entrées d’argent, ce que les banques ont cru. Dans quelques cas ils me demandaient le contrat de travail, la déclaration d’impôts ou mon historique de vie salariale de la securité social. A mes entreprises ils demandaient les déclarations de la TVA trimestrielle et, si elles avaient plus de une année, la déclaration d’impôt des sociétés.
A tout ceci on peut répondre adéquatement, et parfois avec des informations réelles. Si non, avec une imprimante, photocopieuse, ciseaux et scotch, on fait des merveilles ! Dans quelques cas, j’ai dû acheter la voiture pour laquelle j’avais sollicité le prêt, et finalement j’ai tout vendu avant de cesser de rembourser pour qu’ils ne puissent rien réquisitionner pour impayement et ainsi avoir plus de fonds pour financer les luttes. Cela surprendra que j’ai obtenu 492.000 euros sans aval bancaire ni garanties, dans un contexte de contraction du crédit. C’est une démonstration de comment la banque promeut l’endettement des familles au-dessus de tout contrôle et de toute mesure de prévention de risques et de sens commun. Comme conclusion, il y a un fait qui peut nous aider à comprendre les possibilités et les opportunités de ce type d’action : les banques et les organismes financiers ont besoin d’accorder des crédits, parce que c’est une de ses principales manières d’obtenir des bénéfices et parce que, comme nous avons déjà expliqué dans un autre article précédent, le système financier a besoin de faire signer toujours plus de crédits pour pouvoir créer toujours plus de l’argent. C’est une roue que ne s’arrêtera jamais jusqu’à ce que le système s’effondre. Pour notre part, au lieu de continuer à aider faire tourner la roue en demandant des crédits pour produire ou pour consommer, nous avons l’opportunité et la responsabilité de mettre du sable dans les engrenages, en faisant croire que nous voulons des crédits et qu’ils peuvent ainsi créer cet argent grâce à nous. Ensuite, ne restituant pas les prêts, nous faisons disparaître cet argent et celui qui avait été créé du néant, à partir de la simple signature de l’emprunt banquaire. Le système fonctionne à partir de la confiance et si au moyen d’actions comme celles-ci, nous parvenons à semer la méfiance, nous pourrons l’abolir (le détruire ?) !
Pourquoi cette action ?
La crise que nous avons expliqué dans des articles précédents [de la présente revue CRISI, voir les articles complets en anglais et espagnol sur voir www.17-s.info] était prévisible, particulièrement dans sa partie de déclin énergétique ou “pic du pétrole”. Il y a trois ans j’ai connu les refleciones sur le zénith du pétrole et j’ai pensé qu’au moment où se déclencherait la crise il serait fondamental que nous soyons préparés. Cela pourrait être une occasion pour un changement social, un moment historique qui devait être profité. Mais si nous ne nous préparions pas, le futur pourrait être y compris bien pire que ce qui nous arrive maintenant, puisque la gestion de la pénurie gérée par les pouvoirs économiques et politiques pourrait nous emmener vers un nouveau fascisme.
Souvent, un des problèmes actuels que nous trouvons quand nous parlerons de transformation sociale est qu’il nous est difficile d’identifier les ennemis principaux. Non en vain, ils jouent bien leurs cartes pour qu’il nous soit difficile de les identifier. Comme nous avons vu dans l’article sur le système financier, il y a des mécanismes dissimulés et pervers qui font qu’une minorité contrôle la création d’argent et, à partir de là, font que le système économique aille au rythme qui les intéresse le plus. Démasquer cette minorité, ce système bancaire qui nous emmène à l’effondrement écologique, me paraissait fondamental et ça a été une motivation claire pour effectuer cette action d’insoumission financière et la rendre publique.
Une autre raison de poids a été de pouvoir de renforcer les mouvements sociaux pour qu’ils puissent être préparés pour la crise, en essayant des alternatives qui puissent se transformer en exemple d’un mode de vie viable quand celle-ci éclatera. Je croyais que pour ceci il fallait davantage d’argent que celui que nous pouvons obtenir par d’autres moyens, puisque, selon mon expérience dans les mouvements sociaux, un des facteurs importants qui limite les projets transformateurs a été toujours le manque de capacité économique pour lancer des projets stratégiques au moment opportun et les maintenir dans le temps. Ces dernières années beaucoup alternatives de société se mettent en marche depuis la pratique et sans idées dogmatiques. Il y a beaucoup d’initiatives qui, depuis l’autonomie et l’autogestion, recherchent des modes de vie dans lesquels elles croient comme alternative au système capitaliste actuel. Il y a des efforts clairs et décidés pour se coordonner et s’organiser ensemble en réseau, commençant à mettre en pratique un autre modèle de société. Des chemins sont déjà commencés, faut maintenant les maintenir et les renforcer.
A qui est allé l’argent ?
Une fois commissions payées, intérêts, notaires, impôts et frais divers en rapport avec l’action et qui ne font pas partie de l’argent disponible pour le changement social, il reste quelque 360.000 euros qui ont été destinés, entre autres, à la publication qui as entre les manos. Le reste est va à diverses actions et initiatives destinées tant à faire prendre conscience sur la crise systémique (énergétique, alimentaire, économique…) comme, spécialement, promouvoir un mouvement social large qui mette en marche d’autres manières de vivre en société en même tant qu’il fait face au modèle capitaliste actuel, et ayant pour but de le remplacer. Je ne donnerai pas de détails dans ce document pour ne pas créer des problèmes aux projets qui ont reçu cet argent sans être responsables de cela, mais je confie que la mémoire des personnes avec laquelle j’ai partagé ces derniers moments activera le bouche-l’oreille pour que beaucoup de gens puissent savoir avec certitude que les fonds ont été orientés en ce sens.
Un appel à l’action
Cette action veut être surtout un appel pour que chacune s’interroge sur ce qu’il peut et veut faire pour changer l’état des choses parmi ce qu’il est possible ou même ce qu’il pourrait paraître impossible de faire…
Si j’ai mené à bien cette insoumission financière, en risquant ma liberté pour démontrer que le système économique est plus vulnérable que ce qui paraît et pour obtenir cette somme d’argent pour la construction d’alternatives, peut-être beaucoup d’autres personnes pourront en faire autant et même plus, si elles croient en elles-mêmes, si elles savent se libérer des fausses peurs que le système nous inculque avec prémeditation et si elles voient clairement que seulement nous, les gens, depuis en bas, nous pouvons changer l’état des choses.
En prennant l’exemple de l’action que j’ai mené à bien, chacun, selon son contexte personnel et économique, peut se rendre compte qu’il y a des choses qui sont à sa portée :
- Les locataires, qui souffrez de l’augmentation des prix (qui vient habituellement après l’augmentation des prix d’achat immobilier) vous pouvez vous rassembler pour entamer une grève de loyers comme celle des années 1930 et 31 ; il y a déjà des gens qui pensent à cela…
- Si vous payez un prêt hypothécaire depuis quelques années et vous il reste beaucoup de temps de travail dans un poste qui vous n’aimez pas, peut-être vous pouvez cesser de rembourser le prêt et squatter votre propre maison. Si vous le faites seul peut-être aurez-vous un problème (mais pas bien plus grand que celui que vous aviez déjà et en outre vous pourrez réorienter votre vie à ce qui vous aimez et ce qui est cohérent avec vos idées et vocations), mais si beaucoup de gens sont organisés, ce sera la banque qui aura un problème…
- Si vous êtes des personnes impliquées socialement et que vous voulez collaborer avec les mouvements sociaux, vous savez maintenant déjà que vous avez l’option de solliciter quelques prêts et ne pas les payer pour ainsi financer les luttes, tout en créant des problèmes au système financier. Il y a des manières de le faire sans recevoir pour cela aucune accusation pénale, il serait question de le faire à une échelle plus petite que la mienne et de ne pas le rendre public. Dans ce cas vous je peux vous donner un coup de main, ha ha.
- Si vous êtes déjà en chemin de devoir vivre sans compte bancaire parce que vous avez reçu une condamnation ou amende (de celles qui abondent tellement actuellement) que vous ne voulez pas payer, pourquoi ne pas exproprier un peu d’argent à la banque avant qu’arrive le moment de ne plus avoir de compte courant ?
Bien sûr, en faisant ces choix ou tout autre que vous puissez imaginer vous serez insolvables à vie (ou temps que survit ce système financier en crise…), de sorte qu’il serait recommandable que vous le pensiez comme idée accompagnée d’un plan personnel pour vivre d’une autre manière, sans comptes courants ni propriété.
- De toute façon, si vous ne pouvez ou ne voulez pas mener à bien aucune des actions précédentes, il y a deux choses plus simples que tout le monde peut et devrait faire le plus rapidement : ne solliciter aucun crédit et retirer l’argent de la banque.
En maintenant des prêts, cartes de crédit et comptes courants, nous sommes complices des banques qui représentent le coeur d’un système capitaliste qui sème la destruction sur la planète, la pauvreté et l’esclavage de nos vies. Retirer l’argent de la banque est une chose que toute personne peut faire en s’organisant simplement un peu pour gérer ses paiements et encaissements d’une autre manière. Et si cet appel arrive tard parce qu’il y a des dettes que n’as-tu pas pu payer et que tu apparais déjà dans les listes de mauvais payeurs des banques… pourquoi ne te mets-tu pas en contact avec moi pour que nous montions un syndicat de mauvais payeurs? Il y a davantage de personnes inscrites dans les listes des mauvais payeurs que dans celles du chômage… et vivre sans compte courant est un art qu’il vaudrait la peine de partager !
Ce que je vais faire dorénavant.
Au moment ou j’écris ce communiqué public il n’y a encore aucune accusation pénale contre ma personne, fait qui prouve que j’ai pu mener à bien l’action jusqu’à la fin dehors tout contrôle ou de soupçon policier. De toute façon, selon le système judiciaire de l’état espagnol (et sans compter avec sa motivation éthique), à partir de cette confession devrait m’accuser de grande escroquerie (considérée à partir de 50.000 euros) et d’insolvabilité punissable (aussi appelée soulèvement de biens). Par la première accusation je peux me voir emprisonné entre 2 et 6 ans, et par la deuxième entre 1 et 3 ans. Je préfère revendiquer cette action publiquement comme désobéissance civile pour que tout le monde puisse savoir ce qui peut être fait et pour questionner le système financier au lieu de le dissimuler comme me recommanderait toute personne qui pense d’abord à son intégrité personnelle. Puisque ma position est clairement de reconnaitre et défendre moralement et politiquement mon action et puisque je ne pense pas que le système judiciaire est légitime pour me juger (car il fait partie d’un système politique totalement antidémocratique à cause de sa dépendance des mêmes pouvoirs économiques que je dénonce par mon action), j’ai décidé d’accompagner cette explication publique de ma disparition physique. De cette manière j’éviterai que de possibles représailles contre ma liberté ou mon corps m’empêchent de continuer à défendre et expliquer ces faits publiquement et je continuerais actif dans les mouvements sociaux catalans à partir de la participation virtuelle tant que je me trouverais physiquement dans un autre lieu du monde depuis lequel je prendrais aussi part aux luttes sociales. Par la suite, je me réserve la possibilité d’apparaître à nouveau physiquement en territoire catalan, si la société civile catalanne est préparée pour défendre la liberté des personnes qui faisons face publiquement aux pouvoirs économiques et politiques de notre société. Et si un jour, par volonté propre ou non, je suis jugé, j’annonce que le seul verdict que j’accepterai sera l’absolution par considération du tribunal que mon action n’est pas constitutive d’infraction, en raison de sa motivation morale et solidaire contre les acteurs qui font davantage de dommages que de bien commun. De plus, je ne négocierai pas de peines plus réduites afin d’éviter une peine de prison, et je ne payerai pas de caution ni d’amende, pas plus que je négocierai la dette. Si l’état est incapable de sortir de la pression des pouvoirs factuels, que tout le monde le voit en maintenant à une personne comme moi en prison. Depuis ce moment, vous pourrez connaître mon identité et contacter avec moi à travers le web http://www.17-s.info où vous pourrez aussi trouver une information plus détaillée.
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