Le problème des dettes publiques
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(Article d’Alain Pilote, paru dans Vers Demain de juin-juillet 1986.)
Tous les pays du monde sont actuellement aux prises avec un problème d’endettement. En 2004, la dette du gouvernement canadien dépasse les 500 milliards $, et celle des Etats-Unis dépasse les 7000 milliards $. Pourquoi tous les pays sont-ils endettés? C’est bien simple: c’est que dans le système actuel, tout argent vient au monde sous forme de dette, et qu’il est impossible de rembourser la dette totale du pays. Cela peut facilement être démontré de façon mathématique, comme le démontre l’exemple qui suit.
L’Ile des Naufragés
Dans toute société, le système économique peut être divisé en deux: système producteur et système financier. C’est l’exemple de la parabole de L’Ile des Naufragés, de Louis Even: d’un côté, cinq naufragés sur une île, qui produisent les différentes choses nécessaires à la vie; et de l’autre, un banquier qui leur prête de l’argent. Pour simplifier notre example, disons qu’il y a un seul; emprunteur au nom de toute la communauté, que nous appellerons Paul.
Paul décide, au nom de la communauté, d’emprunter du banquier un montant suffisant pour faire marcher l’économie sur l’île, disons 100 $, à 6% d’intérêt. A la fin de l’année, Paul doit rembourser l’intérêt de 6% à la banque, soit 6 $. $100 moins 6 $ = 94 $, il reste donc 94 $ en circulation sur l’île. Mais la dette de 100 $ demeure. Le prêt de 100 $ est donc renouvelé, et un autre 6 $ doit être payé à la fin de la deuxième année. 94 $ moins 6 $, il reste 88 $ en circulation. Si Paul continue ainsi à payer 6 $ d’intérêt à chaque année, au bout de 17 ans, il ne restera plus d’argent sur l’île. Mais la dette de 100 $ demeurera, et le banquier sera autorisé à saisir toutes les propriétés des habitants de l’île.
La production de l’île avait augmenté, mais pas l’argent. Ce ne sont pas des produits que le banquier exige, mais de l’argent. Les habitants de l’île fabriquaient des produits, mais pas d’argent. Quand bien même les cinq habitants de l’île travailleraient jour et nuit, cela ne fera pas apparaître un sou de plus en circulation. Seul le banquier a le droit de créer l’argent. Il semblerait donc que pour la communauté, il n’est pas sage de payer l’intérêt annuellement.
Reprenons donc notre exemple au début. A la fin de la première année, Paul choisit donc de ne pas payer l’intérêt, mais de l’emprunter de la banque, augmentant ainsi le prêt à 106 $. (C’est ce que nos gouvernements font, puisqu’ils doivent emprunter pour payer seulement l’intérêt sur la dette.) «Pas de problème, dit le banquier, cela ne représente que 36¢ de plus d’intérêt, c’est une goutte sur le prêt de 106 $!» La dette à la fin de la deuxième année est donc: 106 $ plus l’intérêt à 6% de 106 $ — 6,36 $ — pour une dette totale de 112,36 $. Au bout de 5 ans, la dette est de 133,82 $, et l’intérêt est de 7,57 $. «Pas si mal, se dit Paul, l’intérêt n’a grossi que de 1,57 $ en 5 ans.» Mais quelle sera la situation au bout de 50 ans?
croissance de la dette
Dette impayable
La dette augmente relativement peu les premières années, mais augmente ensuite très rapidement. A remarquer, la dette augmente à chaque année, mais le montant original emprunté (argent en circulation) demeure toujours le même: 100 $. En aucun temps la dette ne peut être payée, pas même à la fin de la première année: seulement 100 $ en circulation et une dette de 106 $. Et à la fin de la cinquantième année, tout l’argent en circulation (100 $), n’est même pas suffisant pour payer l’intérêt sur la dette: 104,26 $.
Tout l’argent en circulation est un prêt, et doit retourner à la banque grossi d’un intérêt. Le banquier crée l’argent et le prête, mais il se fait promettre de se faire rapporter tout cet argent, plus d’autre qu’il ne crée pas. Seul le banquier crée l’argent: il crée le capital, mais pas l’intérêt (Dans l’exemple plus haut, il crée 100 $, mais demande 106 $). Le banquier demande de lui rapporter, en plus du capital qu’il a créé, l’intérêt qu’il n’a pas créé, et que personne n’a créé.
La dette publique est faite d’argent qui n’existe pas, qui n’a jamais été mis au monde, mais que le gouvernement s’est tout de même engagé à rembourser. C’est un contrat impossible, que les financiers représentant comme un «contrat saint» à respecter, même si les humains dussent en crever.
L’intérêt composé
L’augmentation soudaine de la dette après un certain nombre d’années s’explique par l’effet del’intérêt composé. A la différence de l’intérêt simple, qui est payé seulement sur le capital original emprunté, l’intérêt composé est l’intérêt payé à la fois sur le capital et sur l’intérêt non payé, qui s’additionne au capital.
En mettant sur un graphique la dette cumulative des cinq habitants de l’île, où la ligne horizontale est graduée en années, et la ligne verticale graduée en dollars, et en joignant tous les points obtenus pour chaque année par une ligne, nous obtenons une courbe qui permet de mieux voir l’effet de l’intérêt composé et la croissance de la dette:
La pente de la courbe augmente peu durant les premières années, mais s’accentue rapidement après 30 ou 40 ans. Les dettes de tous les pays du monde suivent le même principe et augmentent de la même manière. Etudions par exemple la dette du Canada.
La dette du Canada
La dette fédérale est la somme de tous les déficits budgétaires depuis que le Canada existe (Confédération de 1867). Ainsi, le déficit pour l’année 1996, 32,7 milliards $, s’ajoute à la dette de 1995, 543 milliards $, pour une dette totale de 575 milliards $ en 1996. (Si la dette fédérale a diminué depuis ce temps, c’est que cette dette a été transférée aux provinces, car la dette totale ne peut que continuer d’augmenter.)
dette du CanadaLa dette a augmenté sensiblement à la fin des deux guerres mondiales de 1914-1918 et 1939-1945, ce qui peut s’expliquer par le fait que le gouvernement dut emprunter de grandes sommes d’argent pour sa participation à ces deux guerres. Mais ces augmentations de la dette n’ont rien de comparable à la hausse phénoménale des vingt dernières années, alors que la dette passait de 24 milliards $ en 1975 à 224 milliards $ en 1986, puis à 575 milliards $ en 1996, alors que le Canada était en temps de paix et n’a pas eu à emprunter pour la guerre.
C’est l’effet de l’intérêt composé, comme dans l’exemple de l’Ile des Naufragés. Dans cet exemple, le taux d’intérêt demeurait à 6%; si ce taux augmente, la dette augmentera encore plus rapidement (on se souviendra qu’en 1981, les taux d’intérêts avaient atteint un sommet de 22%). 
Il existe une grande différence entre des taux de 6%, 10%, ou 20%, quand on parle d’intérêt composé. Ainsi, si vous empruntez $1.00 à intérêt composé, voici ce que vous aurez à payer au bout de 100 ans:
à 1%………………………..2,75 $
à 2%………………………19,25 $ 
à 3%…………………….340,00 $ 
à 10%……………….13 809,00 $ 
à 12%…………..17405,00 $ 
à 18%………….114207,00 $
à 24%………..2579494,00 $
A 50%, il n’y aurait pas assez d’argent dans le monde entier pour payer votre emprunt d’un dollar! Un autre exemple de l’intérêt composé: un sou (1¢) emprunté à 1% au temps du Christ (1er janvier de l’an 1) aurait donné en 1986 une dette de 3,8 millions $. A 2%, on devrait, non pas le double seulement, mais 314 millions de fois ce montant: 1,2 suivi de 12 zéros (un milliard de millions!).
Il existe une formule pour savoir dans combien de temps un montant double à intérêt composé, c’est la «Règle de 72»: Vous divisez 72 par le taux d’intérêt choisi, et cela vous donne le nombre d’années. Par exemple, à 10%, ça prend 7,2 ans pour que le montant double (72 divisé par 10). 
Dans son rapport de novembre 1993, le vérificateur général du Canada disait que sur la dette nette de 423 milliards $ accumulée par le gouvernement canadien de 1867 à 1992, seulement 37 milliards $ avaient été dépensés pour des biens et services, alors que le reste (386 milliards $, ou 91% de la dette) consistait en frais d’intérêt, ce qu’il a coûté au gouvernement pour emprunter ce 37 milliards $ (c’est comme si le gouvernement avait emprunté ce 37 milliards $ à un taux de 1043%!). En novembre 1995, une étude du Mouvement Desjardins arrivait à la même conclusion: sur la dette fédérale de 543 milliards $ en date du 31 mars 1995, 487 milliards $ (ou 90%) sont le résultat d’intérêts composés. En d’autres mots, le capital dépensé pour des biens et services a déjà été remboursé plus de dix fois!
Tout cela pour démontrer que tout intérêt demandé sur de l’argent créé, même à un taux de 1%, est de l’usure, un vol, une injustice.
dette des Etats-UnisLa dette des Etats-Unis suit la même courbe que celle du Canada, mais avec des nombres dix fois plus gros:
Comme c’était le cas pour le Canada, les premières hausses significatives de la dette publique des Etats-Unis ont eu lieu durant les périodes de guerre: Guerre Civile américain (1861-65), Première et Deuxième Guerres mondiales. De 1975 à 1986, la dette est passée de 533 milliards $ à 2073 milliards $. En 2004, cette dette atteint les 7000 milliards $. Pour la même période, 1975-1986, la dette du Canada a donc augmenté plus rapidement que celle des Etats-Unis (9,3 fois pour le Canada, contre 3,8 fois pour les Etats-Unis). L’explication: les taux d’intérêts étaient plus hauts au Canada durant la même période.
Qu’est-ce qu’un milliard?
Quand nous parlons de millions et de milliards, nous parlons de très grosses sommes, qui sont peut-être difficiles à se représenter: Il y a un milliard de secondes, la première bombe atomique n’avait pas encore fait explosion. Il y a un milliard de minutes, le Christ était encore sur la terre. Et pour dépenser un milliard de dollars, un client devrait dépenser 100 $ à la minute pendant 19 ans.
Mais quand nous parlons de la dette des Etats-Unis, ce n’est pas de milliards qu’il faut parler, mais de milliers de milliards, ou trillions (1 suivi de 12 zéros). En 1986, la dette des Etats-Unis était de 2 trillions $. 2 trillions de billets de 1 $ placés bout à bout feraient 186 millions de milles de long (300 millions de kilomètres), soit de la terre au soleil aller-retour. Si une personne avait à dépenser 2 trillions $ à un taux de 1900 $ à la minute, cela lui prendrait 2000 ans. En 1981, lorsque la dette des Etats-Unis atteignit le cap du premier trillion de dollars, le Président Reagan illustra ce chiffre par cette comparaison: «Si vous aviez dans votre main une pile de billets de 1000 $ de seulement 4 pouces (10 cm) de hauteur, vous seriez millionnaire. Un trillion de dollars représente une pile de billets de 1000 $ de 67 milles (107 kilomètres) de hauteur.»
La pointe de l’iceberg
Si les dettes des gouvernements représentent des sommes énormes, elles ne représentent que la pointe de l’iceberg: en plus des dettes publiques, il existe aussi les dettes privées (individus et compagnies)! Ainsi, en 1994, la dette totale du Canada était de 2800 milliards $, avec moins de 600 milliards $ d’argent en circulation. Et et 1992, aux Etats-Unis, la dette publique était de 4000 milliards $ (4 trillions $), et la dette totale, 16 trillions $, avec seulement 950 milliards $ d’argent en circulation.
service de la detteLe service de la dette
En 1996, le gouvernement canadien a dépensé 49 milliards $ pour payer l’intérêt sur la dette, soit environ un tiers des revenus du gouvernement. Pour financer cette dette, le gouvernement émet des obligations, dont la très grande partie est achetée par les banques et autres institutions financières. 
Concernant la vente de ces obligations aux banques, le gouvernement est unvendeur imbécile: il ne vend pas ses obligations aux banques, il en fait cadeau, puisque ces obligations ne coûtent absolument rien aux banques, car elles créent l’argent pour les acheter. Non seulement les banques obtiennent ces obligations pour rien, mais elles en retirent de l’intérêt (payé par les taxes des contribuables).
Marriner EcclesWright PatmanEst révélateur sur ce sujet l’échange qui eut lieu entre M. Wright Patman (photo de gauche), Président du Comité de la Chambre des Représentants des Etats-Unis sur la Banque et le Numéraire, et M. Marriner Eccles (photo de droite), Président de la «Federal Reserve Board» (Banque centrale des Etats-Unis), le 30 septembre 1941, au sujet de la création de 2 milliards $ par la «Réserve Fédérale»:
Patman: «Où avez-vous pris l’argent pour acheter ces 2 milliards $ d’obligations du gouvernement?»
Eccles: «Nous les avons créés.»
Patman: «Avec quoi?»
Eccles: «Avec le droit d’émettre du crédit, de l’argent.»
Patman: «Et il n’y a rien d’autre en arrière, sauf le crédit du gouvernement.»
Eccles: «Nous avons les obligations du gouvernement.»
Patman: «C’est exact, le crédit du gouvernement.» 
La solution: un argent sans dette créé par la société
Cela nous met sur la piste de la solution au problème de la dette: si les obligations sont basées sur le crédit du gouvernement, pourquoi le gouvernement a-t-il besoin de passer par les banques pour faire usage de son propre crédit? 
voir aussiThomas Edison
Ce n’est pas le banquier qui donne la valeur à l’argent, mais le crédit du gouvernement, de la société. La seule chose que fait le banquier dans cette transaction, c’est d’apporter une écriture, des chiffres, qui permettent au pays d’utiliseer sa propre capacité de production, de faire usage de ses propres richesses.
L’argent n’est pas autre chose que cela: un chiffre. Un chiffre qui donne droit aux produits. L’argent n’est qu’un signe, une création de la loi (Aristote). L’argent n’est pas la richesse, mais le signe qui donne droit à la richesse. Sans produits, l’argent n’a aucune valeur. Alors, pourquoi payer pour des chiffres? Pourquoi payer pour ce qui ne coûte rien à fabriquer?
Et puisque cet argent est basé sur la capacité de production de la société, cet argent appartient aussi à la société. Alors, pourquoi la société devrait-elle payer les banquiers pour l’usage de son propre argent? Pourquoi payer pour l’usage d’un bien qui nous appartient? Pourquoi le gouvernement n’émet-il pas directement son argent, sans passer par les banques?
 Pas d’inflation
«Oui mais, de l’argent fait par le gouvernement, ça va faire de l’inflation!» s’empresseront de dire les économistes.
Pour qu’il y ait inflation, il faut qu’il y ait plus d’argent émis que de produits. C’est ce qui est arrivé dans le cas des marks allemands en 1923 et des assignats français de Law en 1790, juste avant la Révolution française (deux exemples que les économistes aiment bien citer pour prouver que l’argent fait par le gouvernement serait cause d’inflation). Ces gouvernements savaient parfaitement bien qu’il y avait plus d’argent que de produits, et que cela allait causer de l’inflation, mais ils ont continué d’émettre de l’argent quand même. C’était une mauvaise comptabilité, et ce n’est pas du tout ce que le Crédit Social propose.
Quand le Crédit Social parle d’argent fait par le gouvernement, cela ne veut pas dire que l’argent doit être émis n’importe comment, selon les caprices des hommes au pouvoir: cela veut dire que l’Etat (par un organisme indépendant, qui pourrait très bien être la Banque du Canada), agirait vis-à-vis du volume de l’argent comme un comptable de la production totale du pays. 
Ce que le Crédit Social propose, c’est une comptabilité juste, une expression financière exacte des réalités économiques: exprimer la production par un actif, et la destruction, la consommation par un passif, soit garder un équilibre, une relation constante entre l’argent et les produits: ce rapport étant toujours le même, l’argent garderait toujours sa même valeur, et l’inflation serait impossible. Autant d’argent que de produits: c’est la règle d’or pour éviter l’inflation.
Et puisque l’argent n’est qu’une affaire de comptabilité, c’est un résultat très facile à obtenir, il n’y a qu’à ajuster les chiffres au niveau de la production. Point n’est besoin de contrôles du gouvernement sur la production pour atteindre ce but, le gouvernement n’a qu’à agir selon les statistiques de la production: créer l’argent au rythme de la production, et le retirer de la circulation au rythme de la consommation. (Ce retrait de l’argent se ferait par un mécanisme d’escompte sur les prix, qui est l’opposé de l’inflation, ou hausse des prix.)
Le comptable n’est pas propriétaire de l’argent qu’il compte, il tient les livres. Il ne crée pas les faits, il les relève: l’Etat n’aurait donc rien à avoir avec les choix des citoyens, avec ce que les producteurs font ou ne font pas, ni avec ce que les consommateurs choisissent ou rejettent.
En soi, l’argent émis par le gouvernement n’est pas plus inflationniste que celui des banques, car c’est le même argent, garanti par le même gouvernement, basé sur la même capacité de production du pays pour répondre aux besoins des mêmes citoyens de ce pays. Au contraire, la première cause d’inflation, c’est justement l’argent créé sous forme de dette par les banques: l’inflation, ce sont les prix qui augmentent. Or, l’obligation pour les compagnies et gouvernements qui empruntent de ramener à la banque plus d’argent qu’il en est sorti oblige les compagnies à gonfler leurs prix, et les gouvernements à gonfler leurs taxes. Les gouvernements essaient de combattre l’inflation en haussant les taux d’intérêt, ce qui fait hausser les prix… et hausser l’inflation…
Si on admet que la création de l’argent est possible à une autorité inférieure (les banques), pourquoi ne serait-elle pas possible à l’autorité souveraine du pays? Qu’est-ce qui empêche, qui interdit au gouvernement de le faire? On accepte que les banques créent l’argent, mais on refuse ce droit au gouvernement. Le gouvernement se refuse un privilège qu’il accorde lui-même aux banques: c’est le comble de l’imbécilité.
Rembourser ou effacer la dette?
Certains diront que si on ne veut pas s’endetter, on n’a qu’à ne pas emprunter. Mais comme on l’a vu au début de cet article, si personne n’empruntait d’argent de la banque, il n’y aurait tout simplement pas un sou en circulation, puisque tout l’argent est créé par les banques sous forme de prêt. Seulement pour maintenir le même niveau d’argent en circulation, il faut s’endetter à perpétuité. D’ailleurs, il n’existe même pas assez d’argent dans la pays pour payer la dette fédérale… sans tenir comptes des dettes des provinces, des compagnies, et des consommateurs!
Comment espérer se sortir de dette lorsque tout l’argent pour payer la dette est créé en créant une dette? Dans le système actuel, faire des coupures pour réduire le déficit et tenter de rembourser la dette, c’est absurde et même criminel, puisque cela ne fait que rendre l’argent plus rare. Loin d’apporter la prospérité, cela amènerait une crise économique sans précédent. L’argent pouvant être considéré comme étant la sang de la vie économique, ça serait comme vider l’organisme économique de son sang, et entraîner la mort à brève échéance.
Citons encore l’échange entre MM. Patman et Eccles, au Comité de la Chambre des Représentants des Etats-Unis sur la Banque et le Numéraire, le 30 septembre 1941:
Patman: «Vous avez déclaré que les gens devraient payer leurs dettes au lieu de dépenser leur argent. Vous vous rappelez de cette déclaration, je suppose?»
Eccles: «C’était en rapport avec les achats à crédit.»
Patman: «Croyez-vous que les gens devraient payer leurs dettes quand ils le peuvent, généralement?»
Eccles: «Je pense que cela dépend en grande partie de l’individu; mais, bien sûr, s’il n’y avait pas de dette dans notre système monétaire…»
Patman: «C’est la question que je voulais vous demander.»
Eccles: «Il n’y aurait plus du tout d’argent.»
Patman: “Supposons que tout le monde paie ses dettes, il n’y aurait plus d’argent pour faire marcher les affaires?»
Eccles: «C’est exact.»
Patman: «En d’autres mots, notre système est basé entièrement sur la dette.»
S’acquitter d’une dette est simple justice si la dette est juste. Dans le cas de la dette publique, la justice est de ne point faire de dette, tout en développant le pays. Premièrement, cesser de bâtir des dettes, et pour la dette existante, les seules obligations à reconnaître seraient celles des épargnants, de ceux qui n’ont pas le pouvoir de créer l’argent. La dette diminuerait au cours des années, au fur et à mesure que les obligations viendraient à échéance.
Le gouvernement honorerait intégralement les seules dettes dont l’origine représente un déboursé réel de la part du créancier: obligations acquises par les individus, et non pas les obligations acquises par l’argent créé par les banquiers, qui ne sont que des dettes fictives, créées d’un trait de plume.
Ces dettes dues aux banquiers, le gouvernement n’aurait qu’à les effacer, ce qui signifierait l’effacement immédiat de la plus grande partie des dettes du Canada et des autres pays développés, et pratiquement la totalité des dettes des pays du Tiers-Monde). Les banques ne perdraient absolument rien, puisque c’est elles-mêmes qui avaient créé cet argent, qui n’existait pas avant.
On voit donc que le Pape Jean-Paul II a tout à fait raison de demander l’abolition des dettes publiques pour le Jubilé de l’an 2000. Dans sa lettre apostolique sur la préparation de ce Jubilé, le Saint-Père dit que, dans l’esprit du Livre du Lévitique (25, 8-28), il faut penser à «une réduction importante, sinon à un effacement total, de la dette internationale qui pèse sur le destin de nombreuses nations.»Dans ce livre de l’Ancien Testament, il est fait mention de l’année du jubilé qui était célébrée par les Israélites à tous les cinquante ans, et où toutes les dettes étaient effacées.
*       *       *
Les gouvernements, malgré leurs déclarations souvent stupides, sont parfaitement au courant de l’iniquité de la création de l’argent par des compagnies privées, mais ils n’osent pas faire face à cette puissance, par manque d’appui du peuple.
La seule chose qui manque, c’est l’éducation du peuple, pour lui démontrer la fausseté, l’absurdité et l’injustice du système financier actuel, et l’urgence pour le gouvernement de créer lui-même son argent, au lieu de l’emprunter des banques. Seul Vers Demain dénonce le système actuel et apporte la solution; c’est donc Vers Demain que la population doit étudier. Et pour cela, il faut abonner tout le monde à Vers Demain.
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Le facteur démographique, le pic et le gouffre.


Une crise voulue et planifiée, pour tout centraliser en quelques mains avides et cupides.
Ils feront tout pour empêcher une vraie réforme, même des guerres et des révolutions.
Réformes Obama ? Attentats ? Assassinats ? Manipulations ? Montages ?
Lundi noir ?
Goldman Sachs et JP Morgan profitent honteusement de la crise après l’avoir provoquée. Ils veulent tout concentrer en quelques mains de plus en plus rares. Il faut savoir que Goldman Sachs est la principale des deux banques d’affaires qui ont participé à la titrisation des crédits subprime en connaissant très bien leur toxicité.

A fin 2007, alors que les principales banques étaient dans le rouge, Goldman Sachs a réalisé plusieurs milliards de gains sur des produits dérivés liés aux subprime… En outre les dirigeants de cette banque sont régulièrement présents aux réunions des Bilderberg, dont l’ex secrétaire aux trésor US, H. Paulson (membre Bilderberg qui s’est mis à genoux (sic) devant le Congrès US pour gagner ses milliards…) était auparavant PDG de Goldman Sachs.
Sachant aussi que Warren Buffet était prêt à investir plusieurs milliards dans Goldmann Sachs, il paraît évident que Goldmann Sachs ait été désignée par l’oligarchie financière pour mener cette crise.



Trop souvent, nous avons perdu le contact avec la réalité,observons la croissance du maïs.



Si vous plantez un grain de maïs; il vous donnera normalement trois épis de maïs: Un grain meurt et il pousse trois épis de ce seul grain. Il donne une plante, cette plante vous donne donc environ deux cents grains de maïs. Ce qui veut dire que si vous avez dix grains de maïs, vous en obtiendrez 2,000, cent grains de maïs, vous en avez 20,000.



À Madagascar ou aux Philippines, vous pouvez faire trois récoltes par année, donc vous avez du 60,000 % (sic), 20,000 fois 3 pour 100 grains fait 60,000 %.
Voilà pourquoi la Corée voulait “louer” à très long terme plus de 1,3 millions d’hectares à Madagascar…


Ceci est la générosité de Dieu dans de nombreux domaines.


On produit trop de blé, trop de lait, de beurre, de fromage, trop de viande, trop de tout.



On est capable de surproduire de tout.


Donc, nous sommes actuellement à une époque de surabondance. Le vrai problème est de distribuer cette surabondance, qui peut être de plus en plus grande grâce aux robots et aux nouvelles techniques et connaissances…

Ce sont les hommes qui font monter les prix et qui jettent des montagnes de produits pour pouvoir payer leurs dettes fabriquées du néant par le monopole bancaire privé du FED US.

http://pavie.ch/articles.php?lng=fr&pg=765

Ils jettent du lait, de la viande, du beurre et même du vin par tonnes.

L’homme a une bouche pour consommer mais deux mains pour produire et distribuer. Il est capable de surproduire de tout.

L’Argentine bien exploitée pourrait nourrir l’Europe entière.

Le Texas pourrait loger le monde entier actuel dans des villas avec jardin bio et piscine, le reste de la terre serait vide…

La terre est très généreuse, le pharaon croyait aussi que l’Égypte était surpeuplée mais il se trompait déjà.

http://desiebenthal.blogspot.com/2009/07/chute-de-population-et-savoir-les.html

L’économiste Julian Simon affirme qu’il avait été payé pour prouver que la terre est surpeuplée, ce qu’il croyait sincèrement au début de son étude. Il raconte, dans son livre ” the ultimate ressource”, qu’il lui a fallu deux ans pour se prouver à lui-même qu’il avait tort et finalement il démonte dans ses plus récents ouvrages le mensonge pour lequel il était censé travailler. Voilà enfin un intellectuel honnête.

Par contre, la croissance des crédits à intérêts exponentiels par les masses monétaires m1 m2 et m3 est énorme, ce qui crée de graves problèmes écologiques…

http://desiebenthal.blogspot.com/2008/03/scandales-bancaires-ordures-pollution.html

http://www.youtube.com/watch?v=YDEe0Ai6lTM

celle de M3 par la FED, est secrète depuis 2006…La FED est une banque privée (sic)

http://www.vimeo.com/1711304

http://www.vimeo.com/2095828

L’IRS est aussi illégal et privé, basé à Puerto Rico (sic).

http://www.illuminati-news.com/irs.htm

Le système bancaire actuel cause la pauvreté en face de
l’abondance en endettant tous les pays et personnes. Les prêts à intérêts ne sont pour la plupart que de simples écritures tirées du néant, c’est à dire de la fausse monnaie,
selon Maurice Allais, Prix Nobel d’économie en 1988
dans « La crise mondiale aujourd’hui »
(Ed. Clément Juglar 1999).

[Europe-hiver.jpg]


Les dominateurs du monde trouvent que la crise ne va pas assez vite vers le bas…

La crise 2008 déjà annoncée en 1989 lors d’un grand congrès à Lausanne, notamment par les facteurs démographiques.

Le livre: ” Europe: l’hiver démographique” en parlait déjà en 1989. ( Edition l’age d’homme, Lausanne et Paris )

Les courbes de population utilisées qui y étaient utilisées était notamment celles de Jean Bourgeois Pichat.

Ces graphiques mis en conclusion du livre démontrait que si aucune réaction sérieuse n’intervenait, nous aurions un maximum de population vers 8 milliards autour de 2040 puis l’effondrement d’une population vieillie retombant en 2100 bien en dessous du niveau actuel. En vérité nous devons faire face aux deux problèmes à la fois et, sur le plan écologique, aboutir à de vrais efforts en matière de respect de la nature, de lutte contre les gaspillages, d’éducation des populations.

“La France deviendra dans moins de 20 ans la colonie de ses anciennes colonies”…?
(Vladimir Poutine – interview Agence TASS – Septembre 1995)

Vladimir Poutine a dit aussi :

“Bien sûr que je suis un pur et absolu démocrate ! La tragédie, c’est que je suis le seul pur démocrate au monde. Depuis la mort du Mahatma Gandhi, je n’ai plus personne à qui parler”

(Sources: Courrier International, Quid.fr)

la patate a augmenté de + de mille quatre cents pour cent, 1435 %.! plus de 14 fois plus cher…

La crise économique tout le monde en parle…….mais concrètement qu’elle a été l’augmentation des prix depuis… 2000 à …2008 ?
L’aliment de base … « le pain du pauvre » la pomme de terre a augmenté entre 200 et 2008 de…. + 1435 %…… en Europe…!!!  plus de 14 fois plus cher…

Plusieurs produits en hausse ne sont pas dans le “panier de la ménagère” qui sert à calculer le taux “officiel” d’inflation…Beaucoup trop de tricheries…
Goldman Sachs et JP Morgan profitent de la crise après l’avoir provoquée. Ils veulent tout concentrer en quelques mains de plus en plus rares. Il faut savoir que Goldman Sachs est la principale des deux banques d’affaires qui ont participé à la titrisation des crédits subprime en connaissant très bien leur toxicité.
A fin 2007, alors que les principales banques étaient dans le rouge, Goldman Sachs a réalisé plusieurs milliards de gains sur des produits dérivés liés aux subprime… En outre les dirigeants de cette banque sont régulièrement présents aux réunions des Bilderberg, dont l’ex secrétaire aux trésor US, H. Paulson (membre Bilderberg qui s’est mis à genoux (sic) devant le Congrès US pour gagner ses milliards…) était auparavant PDG de Goldman Sachs.
Sachant aussi que Warren Buffet était prêt à investir plusieurs milliards dans Goldmann Sachs, il paraît évident que Goldmann Sachs ait été désignée par l’oligarchie financière pour mener cette crise. En ce qui concerne JP Morgan celle-ci serait en mains des Rockefeller.

“Le pire est à venir dans le secteur financier.

Il faut se tenir loin des valeurs bancaires”, déclare à l’AFP Stuart Plesser de Standard & Poor’s.

Inflation, baisse du pouvoir d’ achat, augmentation des prix, etc… INSEE, experts, OCDE, gouvernement, droite, gauche tout le monde en parle mais concrètement pour quelqu’un de normal QUELLE EST L’AUGMENTATION DES PRIX DEPUIS 2000 ?
Voici les chiffres réels de l’augmentation des prix concrète (entre 2000 et 2006) des choses qu’achètent les gens normaux.
(Un prochain article actualisera ces prix avec leur situation en 2008 et on verra que l’augmentation constatée en 2006 était de la rigolade
)

A la fin de la liste des augmentations de prix du lait, du beurre, du fromage, du fuel domestique, des pommes de terre, du pain, du café, vous verrez aussi la variation du salaire moyen entre 2000 et 2005 ainsi que la variation du salaire présidentiel entre 2000 et 2007 (ainsi que celle du budget de l’Elysée)..

Une conclusion s’impose: le président de la république actuel, Mr Sarkozy, peut consommer du beurre, du lait, des pommes de terre, du café en même quantités que son prédécesseur de 2000 …
Inflation du prix de la baguette de pain entre 2000 et 2006 : + 85%

http://blog.aufeminin.com/blog/seeone_323218_7439103/La-femme-aux-semelles-de-vent/Un-petit-comparatif-2000-2008

http://www.impots-utiles.com/les-vrais-chiffres-de-l-inflation-et-de-l-augmentation-des-prix-depuis-2000.php

Pour de vraies démocraties économiques polyarchiques:

Plusieurs centaines de délégués de l’institut Louis Even pour la Justice Sociale et Pèlerins de saint Michel, réunis en congrès international  à Saint Michel de Rougemont, Canada, ou ayant été empêchés de venir par manque de visas, forts de l’appui de presque tous les citoyens qu’ils visitent ou de leurs près de 100’000 abonnés et de leurs millions de lecteurs-sympathisants, présentent aux membres des gouvernements de tous les pays, la résolution suivante:
Attendu que les biens de la terre ont été créés par Dieu pour tous les êtres humains et qu’ils doivent être à la disposition de tous et chacun, pour le développement de tout l’homme et de tous les hommes , selon la sainte Volonté de Dieu;
Attendu que tous les chrétiens doivent travailler à changer les structures du système économique actuel, afin de le rendre serviteur de chaque personne humaine, sans exception;
Attendu que la grande pauvreté actuelle des peuples ne provient pas d’un manque de biens réels, mais du système financier contrôlé par les financiers internationaux;
Attendu que le pouvoir de créer l’argent des pays est concédé inconstitutionnellement par les gouvernements aux banques privées; alors que ce pouvoir souverain relève des véritables représentants des peuples;
Attendu que nos gouvernements et nos peuples sont littéralement écrasés sous le fardeau des dettes publiques et privées, des taxes et des impôts;
Il est proposé;
Que les congressistes et les sympathisants prient instamment leurs gouvernements à:
Stopper toutes démarches visant à instaurer un gouvernement mondial qui aurait pour effet d’établir une dictature sans égale, sur l’univers entier;
Reprendre leur droit souverain de créer l’argent de leur pays, sans dette et sans intérêt, en le basant sur la production du pays.
Cesser d’emprunter des banques privées et de prendre les mesures pour effacer immédiatement leur dette nationale, dont plus de 90% est attribuable aux intérêts composés, qu’ils considèrent comme de l’usure outrancière inacceptable pour un honnête gouvernement et ses citoyens;
De distribuer un dividende mensuel à chaque être humain, de la conception à la tombe, pour la prospérité de chaque personne et pour la bonne marche de l’économie du pays. Ce qui aurait pour effet de mettre fin au scandale de la pauvreté et répondrait au désir de toutes les personnes de bonne volonté.
Que les congressistes prient aussi les gouvernements inférieurs et les municipalités de se servir de tout leur pouvoir pour obliger le gouvernement de leur pays à agir dans ce sens. Un système d’argent national permettrait à tous les gouvernements de s’administrer sans dettes, sans taxes et sans impôts.
Que copie de cette résolution soit envoyée aux Membres des gouvernements de chaque pays, ainsi qu’aux média d’information pour publication.
L’économie du salut:
J’aime bien montrer une pièce de monnaie de la Confédération helvétique. C’est 5 Fr, la plus grosse pièce suisse. D’un côté, vous avez la croix suisse: le Royaume du Christ; de l’autre côté vous avez la justice sociale: l’image de Guillaume Tell, le libérateur des pauvres et des opprimés; et sur le long de la tranche de la pièce écrit en latin: Dominus providevit (Dieu vous donnera tout le reste par surcroît). C’est vraiment une monnaie qui est encore chrétienne, qui explique l’Évangile sous forme d’argent.

Un autre élément important à signaler: rappelez aux gens que Dieu est généreux. Ce «Dominus providevit» c’est vraiment un Dieu généreux.


http://desiebenthal.blogspot.com/2008/09/ami-chicago-du-2509-fte-de-st-nicolas.html



Un article vaudois de 2003 qui commençait à révéler le système, sans le remettre en cause


Le canton de Vaud a huit milliards de dettes.
Est-ce grave?

Interview

par Anne Gaudard, journaliste RP
article en PDF (5,4 Mo)


Pendant que les cantons et la Confédération s’affrontent durement à propos de leurs finances respectives, «Allez savoir!» vous propose de découvrir comment les chercheurs évaluent l’importance des dettes d’un État. Zoom sur l’exemple vaudois avec Délia Nilles, directrice adjointe du Créa.

Les finances publiques figurent en bonne place dans l’agenda politique de cet automne. A cause notamment des élections fédérales, de la présentation des budgets ou de la situation économique, mais encore de la nouvelle péréquation financière entre la Confédération et les cantons. Et surtout à cause du nouveau paquet d’allégements fiscaux. Un sujet brûlant, puisque l’on a parlé à son propos d’une jacquerie cantonale, référendum au poing. Et ce pour la première fois depuis que la Suisse existe.
Pour beaucoup de cantons, en effet, ces décisions fédérales ne représentent rien de moins qu’un coup de pied ravageur dans leur laborieuse tentative de recherche d’équilibre financier. Car elles pourraient signifier diminution des recettes et parfois même augmentation des charges.

Le poids des dettes vaudoises
Parmi les cantons suisses, il en est un qui s’inquiète tout particulièrement : le nôtre. Vaud vit en effet dans un rouge toujours plus foncé depuis le début des années 1990. Cette période de stagnation économique a vu une forte augmentation des revenus et des charges, avec une petite longueur d’avance pour ces dernières, longueur que les revenus ne sont, depuis, jamais parvenus à rattraper. Creusant le lit de la dette. L’Institut de macroéconomie appliquée Créa de l’Université de Lausanne relevait ainsi en 1998 que, depuis 1992, on remarque une forte augmentation des charges d’intérêts «non pas à cause d’une hausse des taux d’intérêt mais à cause de l’augmentation massive de la dette».

En 2002 encore, le Conseil d’Etat constatait que, malgré les mesures prises, la croissance des charges restait «plus importante que la progression des revenus». A fin 2003, selon Standard & Poor’s, la dette devrait représenter plus de 150 % des recettes de fonctionnement, contre 127 % à fin 2001.

• Quand une dette devient-elle excessive? Huit milliards de dettes
Signalons tout de même que la recapitalisation de la BCV a passé par là… Ainsi, entre 1990 et 2002, la dette brute du canton a augmenté de 385 %. La dette totale du canton dépasse au-jourd’hui les 8 milliards* de francs. Les intérêts passifs – bien qu’en régression en raison de l’évolution des taux d’intérêt – se montaient en 2002 à près de 300 millions de francs.
Conséquences, pour continuer dans l’énumération de chiffres et pour es-sayer de schématiser la situation : sur 1000 francs d’impôts qui entrent dans les poches de l’Etat, quelque 100 francs partent directement pour le service de la dette. Une vision encore : sur chacun des 627’933 Vaudois décomptés à fin 2002 pèsent plus de 13’000 francs de dettes, toujours selon le Créa.
«Inutile de réduire le déficit à zéro»
Et l’avenir? Selon le budget présenté, l’exercice 2003 devrait présenter le déficit le moins élevé depuis dix ans, un degré d’autofinancement positif et une charge d’intérêts stable. Des mesures ont été annoncées. Le débat est éminemment politique. Il se con-centre sur les cibles des économies, sur les conséquences d’une évolution à la hausse ou à la baisse des impôts, mais aussi sur l’importance et la nécessité des mesures à prendre en période de mauvaise conjoncture.
Sachant, comme le relevait le Créa en automne 1998, qu’«il n’y a aucune raison de chercher à réduire le déficit à zéro. Il s’agit plutôt de viser la stabilisation du ratio dette / revenu cantonal nominal.»
Au-delà de la confrontation idéologique, peut-on mesurer le degré de gravité de la situation vaudoise? Survol théorique de la situation – donc «sans états d’âme», précise-t-elle – en trois questions en compagnie de Délia Nilles, directrice adjointe du Créa.
1. Comment mesurer la gravité de la situation?
Afin de mesurer le poids de la dette du canton, Délia Nilles se base sur quelques indicateurs communément admis. Tout d’abord, le canton de Vaud répond à deux mesures d’endettement excessif, une statique et une dynamique. «En observant la courbe qui décrit la relation entre les intérêts passifs et les recettes fiscales structurelles dans le canton de Vaud, nous observons que de 1965 au début des années 1990, le poids des intérêts passifs demeure sous les 10 % (7,2 % en moyenne). Dès le début des années 90, tout se dégrade et il passe, dès 1995, au-dessus de la barre des 12 %.» Limite déterminante pour me-surer le poids acceptable ou non d’une dette. Certes, en 2001, la tendance s’est inversée, mais cette variation est liée à la baisse des taux d’intérêt, «ce qui ne signifie pas que la situation se soit vraiment améliorée. Elle s’est améliorée artificiellement.»
Vaud, Genève et St-Gall puisent dans les réserves
Autre indice alarmant pour le canton de Vaud, constate-t-elle, «le taux de croissance de l’économie est inférieur au coût moyen de la dette, il faudrait dégager un solde financier positif pour payer les charges d’intérêts. Or, ce n’est pas le cas : le solde financier est négatif depuis des années déjà dans le canton.»
Par ailleurs, le degré d’autofinancement du canton est le seul en Suisse à avoir été négatif en moyenne sur la période 1994-2002. En 2002, pour prendre des images plus statiques, cite Délia Nilles, «des cantons, comme le Valais ou Fribourg, ont pu financer la totalité de leurs investissements, le Jura à hauteur de 80 %; Vaud, comme Genève et Saint-Gall, en revanche, n’ont rien pu financer en puisant directement dans leur porte-monnaie.»
«La situation se détériore»
Ce n’est donc pas le chiffre de 8,4 milliards de dettes* en lui-même qui est grave, poursuit-elle, «non, ce qui compte c’est d’avoir les moyens de payer les intérêts de cette dette». Et c’est là que le bât blesse, à ses yeux. Le canton de Vaud se trouve dans une situation financière grave de-puis 1995 environ, date depuis laquelle il subit le phénomène appelé «boule de neige» (voir en page 21). En l’observant sur plusieurs années, «on constate que la situation se dé-tériore puisque la dette s’accroît plus vite que ne croît le revenu cantonal».
Ainsi, «le canton se trouve dans une période où le seul poids des intérêts passifs, autrement dit le poids du service de la dette, suffit à faire augmenter cette même dette de manière plus que proportionnelle aux moyens financiers, aux revenus.» Du coup, la marge de manœuvre de l’Etat pour s’engager dans d’autres investissements se réduit. «En fait, actuellement, cette capacité d’action est pratiquement nulle. Vaud n’a plus les moyens de financer ses investissements!» On risque ainsi le double ponctionnement des générations futures : les arriérés de la dette et le manque d’infrastructures nouvelles.

2. Comment expliquer cette situation?
L’économiste situe l’époque charnière entre la fin des années 1980 et le début des années 1990. La cause? C’est à ce moment que se creuse l’écart entre les charges et les recettes du compte de fonctionnement (qui comprend les charges et les revenus bruts, sans les investissements). Depuis, le fossé n’a jamais pu être comblé.
«Derrière ces chiffres, on retrouve des décisions politiques. Des réductions d’impôts ont alors été décidées. En 1987, par exemple, le coefficient familial a été introduit, puis quelques années plus tard, il y a eu deux baisses consécutives du coefficient cantonal d’imposition. Ces décisions ont engendré une diminution des recettes fiscales qui n’a jamais pu être compensée.»

Les recettes baissent, les dépenses augmentent
Et, sale concours de circonstances, les dépenses ont augmenté dès l’entrée en vigueur de ces mesures, notamment sous la pression de la dégradation de la situation conjoncturelle. Si, au début, analyse Délia Nilles, «les raisons de l’augmentation de la dette étaient clairement structurelles – l’écart s’est creusé très vite entre charges et recet-tes, dû aux effets de prises de décision –, par la suite, elles ont été aggravées par des raisons conjoncturelles – crise des années 90. Aujourd’hui, nous vivons une période d’imbrication des deux types de causes. L’économie vaudoise ne croît pas assez pour tenter de réduire ce fossé, d’où l’augmentation de la charge de la dette.»
«Le problème des économies, c’est qu’elles sont dynamiques!» insiste Délia Nilles. Les conséquences d’une décision politique sur une économie ne se font en effet pas sentir immédiatement. Difficile, donc, de savoir quand elle déploiera ses effets et surtout si ce sera le moment opportun.

3. Quelle est l’importance d’un rating médiocre?
Au printemps 2003, Standard & Poor’s a publié son rating annuel pour le canton de Vaud, une manière d’évaluer la solvabilité de l’Etat. Résultat : un A. La meilleure note étant AAA (elle est notamment attribuée à la Confédération), la moins bonne D. A cela s’a-joute une perspective dite «stable».
Cela signifie concrètement que, lors-qu’un canton emprunte de l’argent, les établissements bancaires vont notamment se baser sur leur rating pour fixer le prix de l’argent qui lui sera accordé. Idem lorsqu’il cherchera à lever des fonds. Ainsi, celui qui brandit une meilleure note obtient un meilleur taux d’emprunt en raison du moindre risque que court l’établissement prêteur.

La Confédération est bien mieux notée
Le Conseil d’Etat ne l’a pas caché : «Le rating faible du canton suscitera la prudence des investisseurs, et sera susceptible de renchérir le coût des emprunts.» Avant d’ajouter, en précisant qu’en 2003 l’Etat vise des emprunts à hauteur de 2 milliards : «Le marché seul décidera.»
A ce propos, le syndic de Lausanne Daniel Brélaz rappelait cet été dans les colonnes de «24 heures», lors d’une prise de position contre les coupes budgétaires drastiques envisagées dans le budget fédéral et qui pénaliseraient ainsi les cantons, qu’«aujourd’hui en-core, la Confédération effectue ses emprunts au meilleur niveau possible, soit 0,2 % de moins que le minimum théorique correspondant à la cotation AAA».

L’influence d’un mauvais rating
Ces instruments de mesure ont par ailleurs le mérite de pouvoir faciliter les comparaisons d’un canton à l’autre ou d’une année à l’autre, de servir de référence. Mais ces éléments d’estimation de la capacité financière d’un canton ont-ils une influence économique déterminante? «Fondamentalement, je ne le pense pas, relativise Délia Nilles, dans la mesure où les banques connaissent la situation des cantons ou de la Confédération.»
Rating ou pas, la capacité de remboursement d’un canton est donc con-nue. Reste qu’il est clair que la situation des finances cantonales et donc également de ces ratings influe sur le poids de la dette, tient-elle à souligner : plus le rating est mauvais, plus la prime de risque du prêt est élevée, plus la dette sera donc difficile à rembourser.

*8,4 milliards : chiffre obtenu par l’addition des engagements courants (1,534 milliard), de la dette à court terme (1,882 milliard) et de la dette à long terme (4,977 milliards).Pour Délia Nilles, les engagements courants doivent être pris en compte car ils engendrent aussi des intérêts à payer.

Pour en savoir plus :
Délia Nilles en collaboration avec Jean-Christian Lambelet, «La situation financière du canton de Vaud. Une vue d’ensemble», in Analyses et prévisions, Créa, Lausanne, automne 1998.
Jean-Marc Natal, «Finances des cantons», in Analyses et prévisions, Créa, Lausanne, printemps 1997.

Quand une dette devient-elle excessive?

Plusieurs théories existent en économie pour définir les limites d’endettement. Dans cette fo-rêt de références, deux arguments sont communément admis, relève Délia Nilles.

Des arguments statiques et dynamiques
Le premier est statique. Un endettement est excessif lorsque les intérêts passifs sont supérieurs à environ 12 % des recettes fiscales structurelles (l’es-sentiel des recettes fiscales sauf les revenus irréguliers, comme l’impôt sur les gains immobiliers, qui peut dé-pendre d’une bulle spéculative, ou comme les droits de mutation, etc.).
L’autre argument est dynamique. Une dette est considérée comme trop élevée, si son poids par rapport aux revenus croît par l’effet d’une sorte d’entraînement automatique, par l’«ef-fet boule de neige». Ainsi, dans une économie en croissance, il est possible de cumuler les déficits sans pour autant augmenter la charge financière de la dette à condition que le taux de croissance de l’économie soit supérieur ou égal au coût moyen de la dette calculé en fonction des taux d’intérêt. Ce qui signifie en d’autres termes que le rapport entre le poids de la dette et le revenu cantonal demeure constant.

Le degré d’autofinancement

La directrice adjointe du Créa cite encore deux autres notions importantes pour bien appréhender la notion d’endettement.
La première est le degré d’autofinancement. Il est mesuré en comparant la marge d’autofinancement (somme restante une fois couvertes les dépenses courantes, qui sert en fait à financer les nouveaux investissements) et l’investissement net. Si le degré d’autofinancement est supérieur à 100 %, cela signifie que la totalité des investissements peut être couvert par ce que possède l’Etat. Nul be-soin donc d’em-prunt. S’il est compris entre 0 et 100 %, une partie des investissements sera payée directement de la poche de l’Etat, le reste sera couvert par des em-prunts. S’il est négatif, on doit re-courir à l’emprunt pour tout nouvel investissement.

Capacité d’autofinancement et marge de manœuvre financière

La deuxième se nomme capacité d’autofinancement. Le rapport s’établit entre la marge d’autofinancement et les recettes courantes. Le consensus veut qu’un canton possède une bonne capacité d’autofinancement lorsque sa mar-ge d’autofinancement est supérieure ou égale à 10 % des recettes courantes. Si elle est inférieure, les recours à l’emprunt se multiplient et se profile alors la spirale négative du surendettement.

Ainsi, conclut Délia Nilles, la marge de manœuvre financière d’un canton est appréciée au regard de la capacité d’autofinancement et du poids du service de la dette par rapport aux recettes.
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10. Bilan et indicateurs financiers, en milliers de francs, Etat de Vaud, 1993-2008

  Cliquez ici pour visualiser le fichier XLS original (10. Bilan.xls)


1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008
Actifs   4 319 319 4 965 712 5 812 848 5 967 087 6 610 850 6 904 155 7 521 526 7 962 173 8 435 220 9 126 842 11 456 525 11 955 188 9 728 830 9 069 529 8 777 144 7 436 279
     Patrimoine financier    1 399 329 1 250 141 1 557 624 1 355 462 1 588 351 1 684 308 1 929 835 1 854 895 2 351 666 2 335 781 4 241 479 4 656 032 3 794 600 3 551 413 4 233 912 4 018 550
              Disponibilités 12 778 14 214 42 621 49 559 187 386 304 304 181 284 173 345 251 299 225 217 292 398 386 705 158 122 299 101 1 721 598 1 602 343
              Avoirs 1 212 281 936 362 1 291 267 1 055 486 1 011 375 966 456 1 298 016 922 837 1 480 961 1 414 925 1 620 095 2 246 220 1 718 312 1 644 097 1 741 505 1 709 162
              Placements 50 485 60 723 49 992 60 527 66 633 61 025 58 556 183 401 167 386 278 799 1 624 242 1 691 341 1 495 158 1 111 379 427 290 354 143
              Actifs transitoires 123 786 238 843 173 745 189 890 322 957 352 523 391 980 575 312 452 019 416 841 704 744 331 766 423 008 496 836 343 519 352 902
     Patrimoine administratif    2 290 372 2 559 935 2 657 574 2 732 036 2 815 768 2 833 805 3 025 761 2 900 197 2 740 527 2 547 159 3 018 552 3 286 257 3 059 127 3 088 582 3 016 382 2 846 563
              Investissements 1 077 634 1 116 302 1 145 420 1 183 135 1 183 151 1 186 010 1 196 610 1 184 351 1 199 118 1 233 613 1 178 594 1 163 272 1 016 023 909 633 836 049 815 613
              Prêts et participations 657 900 814 058 819 617 834 226 908 878 882 583 1 074 587 992 702 823 918 625 308 1 226 382 1 517 662 1 477 928 1 629 618 1 661 059 1 553 719
              Subventions d’investissements 554 838 629 575 692 537 714 675 723 739 765 212 754 564 723 144 717 490 688 238 613 576 605 323 565 176 549 331 519 273 477 231
     Découvert    629 618 1 155 636 1 597 649 1 879 589 2 206 731 2 386 042 2 565 930 3 207 080 3 343 027 4 243 902 4 196 494 4 012 898 2 875 103 2 429 534 1 526 850 571 167
Passifs   4 319 319 4 965 712 5 812 848 5 967 087 6 610 850 6 904 155 7 521 526 7 962 173 8 435 220 9 126 842 11 456 525 11 955 188 9 728 830 9 069 529 8 777 144 7 436 279
     Engagements    4 277 385 4 933 699 5 663 380 5 746 737 6 466 489 6 730 192 7 406 051 7 749 157 8 233 597 8 936 948 11 271 242 11 743 334 9 501 790 8 840 393 8 519 545 7 183 735
              Engagements courants 405 621 311 602 331 181 375 122 524 938 606 286 771 364 741 248 1 119 529 1 533 876 2 317 819 2 491 721 2 108 603 2 185 596 2 503 238 2 642 526
              Dettes à court terme 1 083 499 1 306 487 1 055 613 406 500 1 067 621 1 215 074 2 170 124 2 304 145 1 921 724 1 882 000 1 885 298 2 514 025 967 878 562 785 650 000 600 000
              Dettes à moyen et long termes 2 720 000 3 178 663 4 022 471 4 776 440 4 593 409 4 669 378 4 175 348 4 136 317 4 632 786 4 976 755 6 421 561 6 135 000 6 000 000 5 450 000 4 760 000 3 290 000
              Provisions 0 0 0 0 69 280 16 365 15 270 71 356 43 226 33 169 156 144 161 026 15 115 0 0 0
              Passifs transitoires 68 265 136 946 254 115 188 675 211 240 223 089 273 945 496 091 516 333 511 148 490 420 441 562 410 194 642 012 606 307 651 209
     Financements spéciaux    41 934 32 013 149 468 220 350 144 361 173 963 115 475 213 016 201 624 189 894 185 283 211 854 227 040 229 136 257 599 252 544
Indicateurs financiers        
     Engagements bruts    4 277 385 4 933 699 5 663 380 5 746 737 6 466 489 6 730 192 7 406 051 7 749 157 8 233 597 8 936 948 11 271 242 11 743 334 9 501 790 8 840 393 8 519 545 7 183 735
     Actifs financiers    1 399 329 1 250 141 1 557 624 1 355 462 1 588 351 1 684 308 1 929 835 1 854 895 2 351 666 2 335 781 4 241 479 4 656 032 3 794 600 3 551 413 4 233 912 4 018 550
     Engagements nets    2 878 056 3 683 558 4 105 756 4 391 275 4 878 138 5 045 884 5 476 216 5 894 262 5 881 930 6 601 167 7 029 763 7 087 301 5 707 190 5 288 980 4 285 633 3 165 186


Notes liées à ce tableau:
En milliers de francs
Source : Propres regroupements à partir des Comptes de l’Etat (Service cantonal de recherche et d’information statistiques)


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SCRIS, Rue de la Paix 6, 1014 Lausanne, tél: ++41 21 316 29 99


Aristote:

POLITIQUE.

LIVRE I

  Ordre des livreslivre II

 avidité insatiable du commerce ; réprobation de l’usure.

Traduction française : BARTHÉLEMY SAINT-HILAIRE.

Traduction Champagne revue par Hoefer

CHAPITRE III.
De la propriété naturelle et artificielle. – Théorie de l’acquisition des biens ; l’acquisition des biens ne regarde pas directement l’économie domestique, qui emploie les biens, mais qui n’a pas à les créer. – Modes divers d’acquisition : l’agriculture, le pacage, la chasse, la pêche, le brigandage, etc. ; tous ces modes constituent l’acquisition naturelle. – Le commerce est un mode d’acquisition qui n’est pas naturel ; double valeur des choses, usage et échange ; nécessité et utilité de la monnaie ; la vente ; avidité insatiable du commerce ; réprobation de l’usure.

[1256a] § 1. Ὅλως δὲ περὶ πάσης κτήσεως καὶ χρηματιστικῆς θεωρήσωμεν κατὰ τὸν ὑφηγημένον τρόπον, ἐπείπερ καὶ ὁ δοῦλος τῆς κτήσεως μέρος τι ἦν.
Πρῶτον μὲν οὖν ἀπορήσειεν ἄν τις πότερον ἡ χρηματιστικὴ ἡ αὐτὴ τῇ οἰκονομικῇ ἐστιν ἢ μέρος τι, ἢ ὑπηρετική, καὶ εἰ ὑπηρετική, πότερον ὡς ἡ κερκιδοποιικὴ τῇ ὑφαντικῇ ἢ ὡς ἡ χαλκουργικὴ τῇ ἀνδριαντοποιίᾳ (οὐ γὰρ ὡσαύτως ὑπηρετοῦσιν, ἀλλ’ ἡ μὲν ὄργανα παρέχει, ἡ δὲ τὴν ὕλην· λέγω δὲ ὕλην τὸ ὑποκείμενον ἐξ οὗ τι ἀποτελεῖται ἔργον, οἷον ὑφάντῃ μὲν ἔρια ἀνδριαντοποιῷ δὲ χαλκόν). Ὅτι μὲν οὖν οὐχ ἡ αὐτὴ ἡ οἰκονομικὴ τῇ χρηματιστικῇ, δῆλον (τῆς μὲν γὰρ τὸ πορίσασθαι, τῆς δὲ τὸ χρήσασθαι· τίς γὰρ ἔσται ἡ χρησομένη τοῖς κατὰ τὴν οἰκίαν παρὰ τὴν οἰκονομικήν;)
§ 2. Πότερον δὲ μέρος αὐτῆς ἐστί τι ἢ ἕτερον εἶδος, ἔχει διαμφισβήτησιν· εἰ γάρ ἐστι τοῦ χρηματιστικοῦ θεωρῆσαι πόθεν χρήματα καὶ κτῆσις ἔσται, … Ἥ δὲ κτῆσις πολλὰ περιείληφε μέρη καὶ ὁ πλοῦτος, ὥστε πρῶτον ἡ γεωργικὴ πότερον μέρος τι τῆς οἰκονομικῆς ἢ ἕτερόν τι γένος, καὶ καθόλου ἡ περὶ τὴν τροφὴν ἐπιμέλεια καὶ κτῆσις;  § 3. Ἀλλὰ μὴν εἴδη γε πολλὰ τροφῆς, διὸ καὶ βίοι πολλοὶ καὶ τῶν ζῴων καὶ τῶν ἀνθρώπων εἰσίν· οὐ γὰρ οἷόν τε ζῆν ἄνευ τροφῆς, ὥστε αἱ διαφοραὶ τῆς τροφῆς τοὺς βίους πεποιήκασι διαφέροντας τῶν ζῴων. Τῶν τε γὰρ θηρίων τὰ μὲν ἀγελαῖα τὰ δὲ σποραδικά ἐστιν, ὁποτέρως συμφέρει πρὸς τὴν τροφὴν αὐτοῖς διὰ τὸ τὰ μὲν ζῳοφάγα τὰ δὲ καρποφάγα τὰ δὲ παμφάγα αὐτῶν εἶναι, ὥστε πρὸς τὰς ῥᾳστώνας καὶ τὴν αἵρεσιν τὴν τούτων ἡ φύσις τοὺς βίους αὐτῶν διώρισεν, ἐπεὶ δ’ οὐ ταὐτὸ ἑκάστῳ ἡδὺ κατὰ φύσιν ἀλλὰ ἕτερα ἑτέροις, καὶ αὐτῶν τῶν ζῳοφάγων καὶ τῶν καρποφάγων οἱ βίοι πρὸς ἄλληλα διεστᾶσιν.
§ 4. Ὁμοίως δὲ καὶ τῶν ἀνθρώπων. Πολὺ γὰρ διαφέρουσιν οἱ τούτων βίοι. Οἱ μὲν οὖν ἀργότατοι νομάδες εἰσίν νἡ γὰρ ἀπὸ τῶν ἡμέρων τροφὴ ζῴων ἄνευ πόνου γίνεται σχολάζουσιν· ἀναγκαίου δ’ ὄντος μεταβάλλειν τοῖς κτήνεσι διὰ τὰς νομὰς καὶ αὐτοὶ ἀναγκάζονται συνακολουθεῖν, ὥσπερ γεωργίαν ζῶσαν γεωργοῦντεσσ· οἱ δ’ ἀπὸ θήρας ζῶσι, καὶ θήρας ἕτεροι ἑτέρας, οἷον οἱ μὲν ἀπὸ λῃστείας, οἱ δ’ ἀφ’ ἁλιείας, ὅσοι λίμνας καὶ ἕλη καὶ ποταμοὺς ἢ θάλατταν τοιαύτην προσοικοῦσιν, οἱ δ’ ἀπ’ ὀρνίθων ἢ θηρίων ἀγρίων· τὸ δὲ πλεῖστον γένος τῶν ἀνθρώπων ἀπὸ τῆς γῆς ζῇ καὶ τῶν ἡμέρων καρπῶν.
§ 5. Οἱ μὲν οὖν βίοι τοσοῦτοι σχεδόν εἰσιν, ὅσοι γε αὐτόφυτον ἔχουσι τὴν ἐργασίαν καὶ μὴ δι’ ἀλλαγῆς καὶ καπηλείας πορίζονται τὴν τροφήν, [1256b] Νομαδικὸς, λῃστρικὸς, ἁλιευτικὸς, θηρευτικὸς, γεωργικός. Οἱ δὲ καὶ μιγνύντες ἐκ τούτων ἡδέως ζῶσι, προσαναπληροῦντες τὸν ἐνδεέστερον βίον, ᾗ τυγχάνει ἐλλείπων πρὸς τὸ αὐτάρκης εἶναι, οἷον οἱ μὲν νομαδικὸν ἅμα καὶ λῃστρικόν, οἱ δὲ γεωργικὸν καὶ θηρευτικόν· ὁμοίως δὲ καὶ περὶ τοὺς ἄλλους· ὡς ἂν ἡ χρεία συναναγκάζῃ, τοῦτον τὸν τρόπον διάγουσιν.
§ 6. Ἡ μὲν οὖν τοιαύτη κτῆσις ὑπ’ αὐτῆς φαίνεται τῆς φύσεως διδομένη πᾶσιν, ὥσπερ κατὰ τὴν πρώτην γένεσιν εὐθύς, οὕτω καὶ τελειωθεῖσιν. Καὶ γὰρ κατὰ τὴν ἐξ ἀρχῆς γένεσιν τὰ μὲν συνεκτίκτει τῶν ζῴων τοσαύτην τροφὴν ὥσθ’ ἱκανὴν εἶναι μέχρις οὗ ἂν δύνηται αὐτὸ αὑτῷ πορίζειν τὸ γεννηθέν, οἷον ὅσα σκωληκοτοκεῖ ἢ ᾠοτοκεῖ· ὅσα δὲ ζῳοτοκεῖ, τοῖς γεννωμένοις ἔχει τροφὴν ἐν αὑτοῖς μέχρι τινός, τὴν τοῦ καλουμένου γάλακτος φύσιν.  § 7. Ὥστε ὁμοίως δῆλον ὅτι καὶ γενομένοις οἰητέον τά τε φυτὰ τῶν ζῴων ἕνεκεν εἶναι καὶ τὰ ἄλλα ζῷα τῶν ἀνθρώπων χάριν, τὰ μὲν ἥμερα καὶ διὰ τὴν χρῆσιν καὶ διὰ τὴν τροφήν, τῶν δ’ ἀγρίων, εἰ μὴ πάντα, ἀλλὰ τά γε πλεῖστα τῆς τροφῆς καὶ ἄλλης βοηθείας ἕνεκεν, ἵνα καὶ ἐσθὴς καὶ ἄλλα ὄργανα γίνηται ἐξ αὐτῶν. Εἰ οὖν ἡ φύσις μηθὲν μήτε ἀτελὲς ποιεῖ μήτε μάτην, ἀναγκαῖον τῶν ἀνθρώπων ἕνεκεν αὐτὰ πάντα πεποιηκέναι τὴν φύσιν.
§ 8. Διὸ καὶ ἡ πολεμικὴ φύσει κτητική πως ἔσται (ἡ γὰρ θηρευτικὴ μέρος αὐτῆς), ᾗ δεῖ χρῆσθαι πρός τε τὰ θηρία καὶ τῶν ἀνθρώπων ὅσοι πεφυκότες ἄρχεσθαι μὴ θέλουσιν, ὡς φύσει δίκαιον τοῦτον ὄντα τὸν πόλεμον.
Ἓν μὲν οὖν εἶδος κτητικῆς κατὰ φύσιν τῆς οἰκονομικῆς μέρος ἐστίν, καθὸ δεῖ ἤτοι ὑπάρχειν ἢ πορίζειν αὐτὴν ὅπως ὑπάρχῃ ὧν ἔστι θησαυρισμὸς χρημάτων πρὸς ζωὴν ἀναγκαίων, καὶ χρησίμων εἰς κοινωνίαν πόλεως ἢ οἰκίας.  § 9. Καὶ ἔοικεν ὅ γ’ ἀληθινὸς πλοῦτος ἐκ τούτων εἶναι. Ἡ γὰρ τῆς τοιαύτης κτήσεως αὐτάρκεια πρὸς ἀγαθὴν ζωὴν οὐκ ἄπειρός ἐστιν, ὥσπερ Σόλων φησὶ ποιήσας
Πλούτου δ’ οὐθὲν τέρμα πεφασμένον ἀνδράσι κεῖται.
Κεῖται γὰρ ὥσπερ καὶ ταῖς ἄλλαις τέχναις· οὐδὲν γὰρ ὄργανον ἄπειρον οὐδεμιᾶς ἐστι τέχνης οὔτε πλήθει οὔτε μεγέθει, ὁ δὲ πλοῦτος ὀργάνων πλῆθός ἐστιν οἰκονομικῶν καὶ πολιτικῶν. Ὅτι μὲν τοίνυν ἔστι τις κτητικὴ κατὰ φύσιν τοῖς οἰκονόμοις καὶ τοῖς πολιτικοῖς, καὶ δι’ ἣν αἰτίαν, δῆλον.
§ 10. Ἔστι δὲ γένος ἄλλο κτητικῆς, ἣν μάλιστα καλοῦσι, καὶ δίκαιον αὐτὸ καλεῖν, χρηματιστικήν, δι’ ἣν οὐδὲν δοκεῖ πέρας εἶναι πλούτου καὶ κτήσεως· [1257a] Ἣν ὡς μίαν καὶ τὴν αὐτὴν τῇ λεχθείσῃ πολλοὶ νομίζουσι διὰ τὴν γειτνίασιν· ἔστι δ’ οὔτε ἡ αὐτὴ τῇ εἰρημένῃ οὔτε πόρρω ἐκείνης. Ἔστι δ’ ἡ μὲν φύσει ἡ δ’ οὐ φύσει αὐτῶν, ἀλλὰ δι’ ἐμπειρίας τινὸς καὶ τέχνης γίνεται μᾶλλον. Λάβωμεν δὲ περὶ αὐτῆς τὴν ἀρχὴν ἐντεῦθεν.
§ 11. Ἑκάστου γὰρ κτήματος διττὴ ἡ χρῆσίς ἐστιν, ἀμφότεραι δὲ καθ’ αὑτὸ μὲν ἀλλ’ οὐχ ὁμοίως καθ’ αὑτό, ἀλλ’ ἡ μὲν οἰκεία ἡ δ’ οὐκ οἰκεία τοῦ πράγματος, οἷον ὑποδήματος ἥ τε ὑπόδεσις καὶ ἡ μεταβλητική. Ἀμφότεραι γὰρ ὑποδήματος χρήσεις· καὶ γὰρ ὁ ἀλλαττόμενος τῷ δεομένῳ ὑποδήματος ἀντὶ νομίσματος ἢ τροφῆς χρῆται τῷ ὑποδήματι ᾗ ὑπόδημα, ἀλλ’ οὐ τὴν οἰκείαν χρῆσιν· οὐ γὰρ ἀλλαγῆς ἕνεκεν γέγονε. Τὸν αὐτὸν δὲ τρόπον ἔχει καὶ περὶ τῶν ἄλλων κτημάτων. Ἔστι γὰρ ἡ μεταβλητικὴ πάντων, ἀρξαμένη τὸ μὲν πρῶτον ἐκ τοῦ κατὰ φύσιν, τῷ τὰ μὲν πλείω τὰ δὲ ἐλάττω τῶν ἱκανῶν ἔχειν τοὺς ἀνθρώπους  § 12. (ᾗ καὶ δῆλον ὅτι οὐκ ἔστι φύσει τῆς χρηματιστικῆς ἡ καπηλική· ὅσον γὰρ ἱκανὸν αὐτοῖς, ἀναγκαῖον ἦν ποιεῖσθαι τὴν ἀλλαγήν). Ἐν μὲν οὖν τῇ πρώτῃ κοινωνίᾳ (τοῦτο δ’ ἐστὶν οἰκία) φανερὸν ὅτι οὐδὲν ἔστιν ἔργον αὐτῆς, ἀλλ’ ἤδη πλειόνων τῆς κοινωνίας οὔσης. Οἱ μὲν γὰρ τῶν αὑτῶν ἐκοινώνουν πάντων, οἱ δὲ κεχωρισμένοι πολλῶν πάλιν καὶ ἑτέρων, ὧν κατὰ τὰς δεήσεις ἀναγκαῖον ποιεῖσθαι τὰς μεταδόσεις, καθάπερ ἔτι πολλὰ ποιεῖ καὶ τῶν βαρβαρικῶν ἐθνῶν, κατὰ τὴν ἀλλαγήν. Αὐτὰ γὰρ τὰ χρήσιμα πρὸς αὑτὰ καταλλάττονται, ἐπὶ πλέον δ’ οὐθέν, οἷον οἶνον πρὸς σῖτον διδόντες καὶ λαμβάνοντες, καὶ τῶν ἄλλων τῶν τοιούτων ἕκαστον.
§ 13. Ἡ μὲν οὖν τοιαύτη μεταβλητικὴ οὔτε παρὰ φύσιν οὔτε χρηματιστικῆς ἐστιν εἶδος οὐδέν νεἰς ἀναπλήρωσιν γὰρ τῆς κατὰ φύσιν αὐταρκείας ἦνν· ἐκ μέντοι ταύτης ἐγένετ’ ἐκείνη κατὰ λόγον. Ξενικωτέρας γὰρ γενομένης τῆς βοηθείας τῷ εἰσάγεσθαι ὧν ἐνδεεῖς ἦσαν καὶ ἐκπέμπειν ὧν ἐπλεόναζον, ἐξ ἀνάγκης ἡ τοῦ νομίσματος ἐπορίσθη χρῆσις. Οὐ γὰρ εὐβάστακτον ἕκαστον τῶν κατὰ φύσιν ἀναγκαίων.
§ 14. Διὸ πρὸς τὰς ἀλλαγὰς τοιοῦτόν τι συνέθεντο πρὸς σφᾶς αὐτοὺς διδόναι καὶ λαμβάνειν, ὃ τῶν χρησίμων αὐτὸ ὂν εἶχε τὴν χρείαν εὐμεταχείριστον πρὸς τὸ ζῆν, οἷον σίδηρος καὶ ἄργυρος κἂν εἴ τι τοιοῦτον ἕτερον, τὸ μὲν πρῶτον ἁπλῶς ὁρισθὲν μεγέθει καὶ σταθμῷ, τὸ δὲ τελευταῖον καὶ χαρακτῆρα ἐπιβαλλόντων, ἵνα ἀπολύσῃ τῆς μετρήσεως αὑτούς· ὁ γὰρ χαρακτὴρ ἐτέθη τοῦ ποσοῦ σημεῖον.  § 15. Πορισθέντος οὖν ἤδη νομίσματος ἐκ τῆς ἀναγκαίας ἀλλαγῆς θάτερον εἶδος τῆς χρηματιστικῆς ἐγένετο, τὸ καπηλικόν, τὸ μὲν πρῶτον ἁπλῶς ἴσως γινόμενον, εἶτα δι’ ἐμπειρίας ἤδη τεχνικώτερον, πόθεν καὶ πῶς μεταβαλλόμενον πλεῖστον ποιήσει κέρδος.  § 16. Διὸ δοκεῖ ἡ χρηματιστικὴ μάλιστα περὶ τὸ νόμισμα εἶναι, καὶ ἔργον αὐτῆς τὸ δύνασθαι θεωρῆσαι πόθεν ἔσται πλῆθος, ποιητικὴ γὰρ εἶναι πλούτου καὶ χρημάτων. Καὶ γὰρ τὸν πλοῦτον πολλάκις τιθέασι νομίσματος πλῆθος, διὰ τὸ περὶ τοῦτ’ εἶναι τὴν χρηματιστικὴν καὶ τὴν καπηλικήν. Ὁτὲ δὲ πάλιν λῆρος εἶναι δοκεῖ τὸ νόμισμα καὶ νόμος παντάπασι, φύσει δ’ οὐθέν, ὅτι μεταθεμένων τε τῶν χρωμένων οὐθενὸς ἄξιον οὐδὲ χρήσιμον πρὸς οὐδὲν τῶν ἀναγκαίων ἐστί, καὶ νομίσματος πλουτῶν πολλάκις ἀπορήσει τῆς ἀναγκαίας τροφῆς· καίτοι ἄτοπον τοιοῦτον εἶναι πλοῦτον οὗ εὐπορῶν λιμῷ ἀπολεῖται, καθάπερ καὶ τὸν Μίδαν ἐκεῖνον μυθολογοῦσι διὰ τὴν ἀπληστίαν τῆς εὐχῆς πάντων αὐτῷ γιγνομένων τῶν παρατιθεμένων χρυσῶν.
§ 17. Διὸ ζητοῦσιν ἕτερόν τι τὸν πλοῦτον καὶ τὴν χρηματιστικήν, ὀρθῶς ζητοῦντες. Ἔστι γὰρ ἑτέρα ἡ χρηματιστικὴ καὶ ὁ πλοῦτος ὁ κατὰ φύσιν, καὶ αὕτη μὲν οἰκονομική, ἡ δὲ καπηλική, ποιητικὴ πλούτου οὐ πάντως ἀλλὰ διὰ χρημάτων μεταβολῆς. Καὶ δοκεῖ περὶ τὸ νόμισμα αὕτη εἶναι· τὸ γὰρ νόμισμα στοιχεῖον καὶ πέρας τῆς ἀλλαγῆς ἐστιν. Καὶ ἄπειρος δὴ οὗτος ὁ πλοῦτος, ὁ ἀπὸ ταύτης τῆς χρηματιστικῆς. Ὥσπερ γὰρ ἡ ἰατρικὴ τοῦ ὑγιαίνειν εἰς ἄπειρόν ἐστι, καὶ ἑκάστη τῶν τεχνῶν τοῦ τέλους εἰς ἄπειρον (ὅτι μάλιστα γὰρ ἐκεῖνο βούλονται ποιεῖν), τῶν δὲ πρὸς τὸ τέλος οὐκ εἰς ἄπειρον (πέρας γὰρ τὸ τέλος πάσαις), οὕτω καὶ ταύτης τῆς χρηματιστικῆς οὐκ ἔστι τοῦ τέλους πέρας, τέλος δὲ ὁ τοιοῦτος πλοῦτος καὶ χρημάτων κτῆσις.  § 18. Τῆς δ’ οἰκονομικῆς χρηματιστικῆς ἔστι πέρας· οὐ γὰρ τοῦτο τῆς οἰκονομικῆς ἔργον. Διὸ τῇ μὲν φαίνεται ἀναγκαῖον εἶναι παντὸς πλούτου πέρας, ἐπὶ δὲ τῶν γινομένων ὁρῶμεν συμβαῖνον τοὐναντίον· πάντες γὰρ εἰς ἄπειρον αὔξουσιν οἱ χρηματιζόμενοι τὸ νόμισμα. Αἴτιον δὲ τὸ σύνεγγυς αὐτῶν.
Ἐπαλλάττει γὰρ ἡ χρῆσις τοῦ αὐτοῦ οὖσα ἑκατέρας τῆς χρηματιστικῆς. Τῆς γὰρ αὐτῆς ἐστι κτήσεως χρῆσις, ἀλλ’ οὐ κατὰ ταὐτόν, ἀλλὰ τῆς μὲν ἕτερον τέλος, τῆς δ’ ἡ αὔξησις. Ὥστε δοκεῖ τισι τοῦτ’ εἶναι τῆς οἰκονομικῆς ἔργον, καὶ διατελοῦσιν ἢ σῴζειν οἰόμενοι δεῖν ἢ αὔξειν τὴν τοῦ νομίσματος οὐσίαν εἰς ἄπειρον.  § 19. Αἴτιον δὲ ταύτης τῆς διαθέσεως τὸ σπουδάζειν περὶ τὸ ζῆν, ἀλλὰ μὴ τὸ εὖ ζῆν· [1258a]  Εἰς ἄπειρον οὖν ἐκείνης τῆς ἐπιθυμίας οὔσης, καὶ τῶν ποιητικῶν ἀπείρων ἐπιθυμοῦσιν. Ὅσοι δὲ καὶ τοῦ εὖ ζῆν ἐπιβάλλονται τὸ πρὸς τὰς ἀπολαύσεις τὰς σωματικὰς ζητοῦσιν, ὥστ’ ἐπεὶ καὶ τοῦτ’ ἐν τῇ κτήσει φαίνεται ὑπάρχειν, πᾶσα ἡ διατριβὴ περὶ τὸν χρηματισμόν ἐστι, καὶ τὸ ἕτερον εἶδος τῆς χρηματιστικῆς διὰ τοῦτ’ ἐλήλυθεν. Ἐν ὑπερβολῇ γὰρ οὔσης τῆς ἀπολαύσεως, τὴν τῆς ἀπολαυστικῆς ὑπερβολῆς ποιητικὴν ζητοῦσιν· κἂν μὴ διὰ τῆς χρηματιστικῆς δύνωνται πορίζειν, δι’ ἄλλης αἰτίας τοῦτο πειρῶνται, ἑκάστῃ χρώμενοι τῶν δυνάμεων οὐ κατὰ φύσιν.  § 20. Ἀνδρείας γὰρ οὐ χρήματα ποιεῖν ἐστιν ἀλλὰ θάρσος, οὐδὲ στρατηγικῆς καὶ ἰατρικῆς, ἀλλὰ τῆς μὲν νίκην τῆς δ’ ὑγίειαν. Οἱ δὲ πάσας ποιοῦσι χρηματιστικάς, ὡς τοῦτο τέλος ὄν, πρὸς δὲ τὸ τέλος ἅπαντα δέον ἀπαντᾶν.
Περὶ μὲν οὖν τῆς τε μὴ ἀναγκαίας χρηματιστικῆς, καὶ τίς, καὶ δι’ αἰτίαν τίνα ἐν χρείᾳ ἐσμὲν αὐτῆς, εἴρηται, καὶ περὶ τῆς ἀναγκαίας, ὅτι ἑτέρα μὲν αὐτῆς οἰκονομικὴ δὲ κατὰ φύσιν ἡ περὶ τὴν τροφήν, οὐχ ὥσπερ αὕτη ἄπειρος ἀλλ’ ἔχουσα ὅρον.
§ 21. Δῆλον δὲ καὶ τὸ ἀπορούμενον ἐξ ἀρχῆς, πότερον τοῦ οἰκονομικοῦ καὶ πολιτικοῦ ἐστιν ἡ χρηματιστικὴ ἢ οὔ, ἀλλὰ δεῖ τοῦτο μὲν ὑπάρχειν (ὥσπερ γὰρ καὶ ἀνθρώπους οὐ ποιεῖ ἡ πολιτική, ἀλλὰ λαβοῦσα παρὰ τῆς φύσεως χρῆται αὐτοῖς, οὕτω καὶ τροφὴν τὴν φύσιν δεῖ παραδοῦναι γῆν ἢ θάλατταν ἢ ἄλλο τι), ἐκ δὲ τούτων, ὡς δεῖ ταῦτα διαθεῖναι προσήκει τὸν οἰκονόμον. Οὐ γὰρ τῆς ὑφαντικῆς ἔρια ποιῆσαι, ἀλλὰ χρήσασθαι αὐτοῖς, καὶ γνῶναι δὲ τὸ ποῖον χρηστὸν καὶ ἐπιτήδειον, ἢ φαῦλον καὶ ἀνεπιτήδειον.
§ 22. Καὶ γὰρ ἀπορήσειεν ἄν τις διὰ τί ἡ μὲν χρηματιστικὴ μόριον τῆς οἰκονομίας, ἡ δ’ ἰατρικὴ οὐ μόριον· καίτοι δεῖ ὑγιαίνειν τοὺς κατὰ τὴν οἰκίαν, ὥσπερ ζῆν ἢ ἄλλο τι τῶν ἀναγκαίων. Ἐπεὶ δὲ ἔστι μὲν ὡς τοῦ οἰκονόμου καὶ τοῦ ἄρχοντος καὶ περὶ ὑγιείας ἰδεῖν, ἔστι δ’ ὡς οὔ, ἀλλὰ τοῦ ἰατροῦ, οὕτω καὶ περὶ τῶν χρημάτων ἔστι μὲν ὡς τοῦ οἰκονόμου, ἔστι δ’ ὡς οὔ, ἀλλὰ τῆς ὑπηρετικῆς· μάλιστα δέ, καθάπερ εἴρηται πρότερον, δεῖ φύσει τοῦτο ὑπάρχειν. Φύσεως γάρ ἐστιν ἔργον τροφὴν τῷ γεννηθέντι παρέχειν· παντὶ γάρ, ἐξ οὗ γίνεται, τροφὴ τὸ λειπόμενόν ἐστι. Διὸ κατὰ φύσιν ἐστὶν ἡ χρηματιστικὴ πᾶσιν ἀπὸ τῶν καρπῶν καὶ τῶν ζῴων.
§ 23. Διπλῆς δ’ οὔσης αὐτῆς, ὥσπερ εἴπομεν, καὶ τῆς μὲν καπηλικῆς τῆς δ’ οἰκονομικῆς, καὶ ταύτης μὲν ἀναγκαίας καὶ ἐπαινουμένης, τῆς δὲ μεταβλητικῆς ψεγομένης δικαίως [1258b] οὐ γὰρ κατὰ φύσιν ἀλλ’ ἀπ’ ἀλλήλων ἐστίνν, εὐλογώτατα μισεῖται ἡ ὀβολοστατικὴ διὰ τὸ ἀπ’ αὐτοῦ τοῦ νομίσματος εἶναι τὴν κτῆσιν καὶ οὐκ ἐφ’ ὅπερ ἐπορίσθη. Μεταβολῆς γὰρ ἐγένετο χάριν, ὁ δὲ τόκος αὐτὸ ποιεῖ πλέον (ὅθεν καὶ τοὔνομα τοῦτ’ εἴληφεν· ὅμοια γὰρ τὰ τικτόμενα τοῖς γεννῶσιν αὐτά ἐστιν, ὁ δὲ τόκος γίνεται νόμισμα ἐκ νομίσματος)· ὥστε καὶ μάλιστα παρὰ φύσιν οὗτος τῶν χρηματισμῶν ἐστιν.
 
[1256a] § 1. Puisque aussi bien l’esclave fait partie de la propriété, nous allons étudier, suivant notre méthode ordinaire, la propriété en général et l’acquisition des biens.
La première question est de savoir si la science de l’acquisition ne fait qu’un avec la science domestique, ou si elle en est une branche, ou seulement un auxiliaire. Si elle en est l’auxiliaire, est-ce comme l’art de faire des navettes sert à l’art de tisser ? ou bien comme l’art de fondre les métaux sert au statuaire ? Les services de ces deux arts subsidiaires sont en effet bien distincts : là, c’est l’instrument qui est fourni ; ici, c’est la matière. J’entends par matière la substance qui sert à confectionner un objet : par exemple, la laine pour le fabricant, l’airain pour le statuaire. Ceci montre que l’acquisition des biens ne se confond pas avec l’administration domestique, puisque l’une emploie ce que l’autre fournit. A qui appartient-il, en effet, de mettre en oeuvre les fonds de la famille, si ce n’est à l’administration domestique ?
§ 2. Reste à savoir si l’acquisition des choses n’est qu’une branche de cette administration, ou bien une science à part. D’abord, si celui qui possède cette science doit connaître les sources de la richesse et de la propriété, on doit convenir que la propriété et la richesse embrassent des objets bien divers. En premier lieu, on peut se demander si l’art de l’agriculture, et en général la recherche et l’acquisition des aliments, est compris clans l’acquisition des biens, ou s’il forme un mode spécial d’acquérir. § 3. Mais les genres d’alimentation sont extrêmement variés ; et de là, cette multiplicité de genres de vie chez l’homme et chez les animaux, dont aucun ne peut subsister sans aliments. Par suite, ce sont précisément ces diversités-là qui diversifient les existences des animaux. Dans l’état sauvage, les uns vivent en troupes, les autres s’isolent, selon que l’exige l’intérêt de leur subsistance, parce que les uns sont carnivores, les autres frugivores, et les autres omnivores. C’est pour leur faciliter la recherche et le choix des aliments que la nature leur a déterminé un genre spécial de vie. La vie des carnivores et celle des frugivores différent justement en ce qu’ils n’aiment point par instinct la même nourriture, et que chacun d’eux a des goûts particuliers.
§ 4. On en peut dire autant des hommes. Leurs modes d’existence ne sont pas moins divers. Les uns, dans un désoeuvrement absolu, sont nomades ; sans peine et sans travail, ils se nourrissent de la chair des animaux qu’ils élèvent. Seulement, comme leurs troupeaux sont forcés, pour trouver pâture, de changer constamment de place, eux aussi sont contraints de les suivre ; c’est comme un champ vivant qu’ils cultivent. D’autres subsistent de proie ; mais la proie des uns n’est pas. celle des autres : pour ceux-ci, c’est le pillage ; pour ceux-là, c’est la pêche, quand ils habitent le bord des étangs ou des marais, les rivages des fleuves ou de la mer ; d’autres chassent les oiseaux et les bêtes fauves. Mais la majeure partie du genre humain vit de la culture de la terre et de ses fruits.
§ 5, Voici donc à peu près tous les modes d’existence où l’homme n’a besoin d’apporter que son travail personnel, sans demander sa subsistance aux échanges ou au commerce : nomade, agriculteur, pillard, pêcheur ou chasseur. [1256b] Des peuples vivent à l’aise en combinant ces existences diverses, et en empruntant à l’une de quoi remplir les lacunes de l’autre : ils sont à la fois nomades et pillards, cultivateurs et chasseurs, et ainsi des autres, qui embrassent le genre de vie que le besoin leur impose.
§ 6. Cette possession des aliments est, comme on peut le voir, accordée par la nature aux animaux aussitôt après leur naissance, et tout aussi bien après leur entier développement. Certains animaux, au moment même de la ponte, produisent en même temps que le petit la nourriture qui doit lui suffire jusqu’à ce qu’il soit en état de se pourvoir lui-même. C’est le cas des vermipares et des ovipares. Les vivipares portent pendant un certain temps en eux-mêmes les aliments des nouveau-nés ; ce qu’on nomme le lait n’est pas autre chose. § 7. Cette possession des aliments est également acquise aux animaux quand ils sont entièrement développés ; et il faut croire que les plantes sont faites pour les animaux, et les animaux, pour l’homme. Privés, ils le servent et le nourrissent ; sauvages, ils contribuent, si ce n’est tous, au moins la plupart, à sa subsistance et à ses besoins divers ; ils lui fournissent des vêtements et encore d’autres ressources. Si donc la nature ne fait rien d’incomplet, si elle ne fait rien en vain, il faut nécessairement qu’elle ait créé tout cela pour l’homme.
§ 8. Aussi la guerre est-elle encore en quelque sorte un moyen naturel d’acquérir, puisqu’elle comprend cette chasse que l’on doit donner aux bêtes fauves et aux hommes qui, nés pour obéir, refusent de se soumettre ; c’est une guerre que la nature elle-même a faite légitime.
Voilà donc un mode d’acquisition naturelle, faisant partie de l’économie domestique, qui doit le trouver tout fait ou se le procurer, sous peine de ne point accumuler ces indispensables moyens de subsistance sans lesquels ne se formeraient, ni l’association de l’État, ni l’association de la famille. § 9. Ce sont même là, on peut le dire, les seules véritables richesses et les emprunts que le bien-être peut faire à ce genre d’acquisition sont bien loin d’être illimités, comme Solon l’a poétiquement prétendu :
L’homme peut sans limite augmenter ses richesses.
C’est qu’au contraire, il y a ici une limite comme dans tous les autres arts. En effet il n’est point d’art dont les instruments ne soient bornés en nombre et en étendue ; et la richesse n’est que l’abondance des instruments domestiques et sociaux.
Il existe donc évidemment un mode d’acquisition naturelle commun aux chefs de famille et aux chefs des États. Nous avons vu quelles en étaient les sources.
§ 10. Reste maintenant cet autre genre d’acquisition qu’on appelle plus particulièrement, et à juste titre, l’acquisition des biens ; et pour celui-là, on pourrait vraiment croire que la richesse et la propriété peuvent s’augmenter indéfiniment. [1257a] La ressemblance de ce second mode d’acquisition avec le premier, est cause qu’ordinairement on ne voit dans tous deux qu’un seul et même objet. Le fait est qu’ils ne sont ni identiques, ni bien éloignés ; le premier est naturel ; l’autre ne vient pas de la nature, et il est bien plutôt le produit de l’art et de l’expérience. Nous en commencerons ici l’étude.
§ 11. Toute propriété a deux usages, qui tous deux lui appartiennent essentiellement, sans toutefois lui appartenir de la même façon : l’un est spécial à la chose, l’autre ne l’est pas. Une chaussure peut à la fois servir à chausser le pied ou à faire un échange. On peut du moins en tirer ce double usage. Celui qui, contre de l’argent ou contre des aliments, échange une chaussure dont un autre a besoin, emploie bien cette chaussure en tant que chaussure, maïs non pas cependant avec son utilité propre ; car elle n’avait point été faite pour l’échange. J’en dirai autant de toutes les autres propriétés ; l’échange, en effet, peut s’appliquer à toutes, puisqu’il est né primitivement entre les hommes de l’abondance sur tel point et de la rareté sur tel autre, des denrées nécessaires à la vie. § 12. Il est trop clair que, dans ce sens, la vente ne fait nullement partie de l’acquisition naturelle. Dans l’origine, l’échange ne s’étendait pas au delà des plus stricts besoins, et il est certainement inutile dans la première association, celle de la famille. Pour qu’il se produise, il faut que déjà le cercle de l’association soit plus étendu. Dans le sein de la famille, tout était commun ; parmi les membres qui se séparèrent, une communauté nouvelle s’établit pour des objets non moins nombreux que les premiers, mais différents, et dont on dut se faire part suivant le besoin. C’est encore là le seul genre d’échange que connaissent bien des nations barbares ; il ne va pas au delà du troc des denrées indispensables ; c’est, par exemple, du vin donné ou reçu pour du blé; et ainsi du reste.
§ 13. Ce genre d’échange est parfaitement naturel, et n’est point, à vrai dire, un mode d’acquisition, puisqu’il n’a d’autre but que de pourvoir à la satisfaction de nos besoins naturels. C’est là, cependant, qu’on peut trouver logiquement l’origine de la richesse. A mesure que ces rapports de secours mutuels se transformèrent en se développant, par l’importation des objets dont on était privé et l’exportation de ceux dont on regorgeait, la nécessité introduisit l’usage de la monnaie, les denrées indispensables étant, en nature, de transport difficile.
§ 14. On convint de donner et de recevoir dans les échanges une matière qui, utile par elle-même, fût aisément maniable dans les usages habituels de la vie ; ce fut du fer, par exemple, de l’argent, ou telle autre substance analogue, dont on détermina d’abord la dimension et le poids, et qu’enfin, pour se délivrer des embarras de continuels mesurages, on marqua d’une empreinte particulière, signe de sa valeur.  § 15. Avec la monnaie, née des premiers échanges indispensables, naquit aussi la vente, autre forme d’acquisition, excessivement simple dans l’origine, mais perfectionnée bientôt par l’expérience, qui révéla, dans la circulation des objets, les sources et les moyens de profits considérables. § 16. Voilà comment il semble que la science de l’acquisition a surtout l’argent pour objet, et que son but principal est de pouvoir découvrir les moyens de multiplier les biens ; car elle doit créer les biens et l’opulence. C’est qu’on place souvent l’opulence dans l’abondance de l’argent, parce que c’est sur l’argent que roulent l’acquisition et la vente ; et cependant cet argent n’est en lui-même qu’une chose absolument vaine, n’ayant de valeur que par la loi et non par la nature, puisqu’un changement de convention parmi ceux qui en font usage peut le déprécier complètement, et le rendre tout à fait incapable de satisfaire aucun de nos besoins. En effet, un homme, malgré tout son argent, ne pourra-t-il pas manquer des objets de première nécessité ? Et n’est-ce pas une plaisante richesse que celle dont l’abondance n’empêche pas de mourir de faim ? C’est comme ce Midas de la mythologie, dont le voeu cupide faisait changer en or tous les mets de sa table.
§ 17. C’est donc avec grande raison que les gens sensés se demandent si l’opulence et la source de la richesse ne sont point ailleurs ; et certes la richesse et l’acquisition naturelles, objet de la science domestique, sont tout antre chose. Le commerce produit des biens, non point d’une manière absolue, mais par le déplacement d’objets déjà précieux en eux-mêmes. Or c’est l’argent qui paraît surtout préoccuper le commerce ; car l’argent est l’élément et le but de ses échanges ; et la fortune qui naît de cette nouvelle branche d’acquisition semble bien réellement n’avoir aucune borne. La médecine vise à multiplier ses guérisons à l’infini; comme elle, tous les arts placent dans l’infini l’objet qu’ils poursuivent, et tous y prétendent de toutes leurs forces. Mais du moins les moyens qui les conduisent à leur but spécial sont limités, et ce but lui-même leur sert à tous de borne ; bien loin de là, l’acquisition commerciale n’a pas même pour fin le but qu’elle poursuit, puisque son but est précisément une opulence et un enrichissement indéfinis. § 18. Mais si l’art de cette richesse n’a pas de bornes, la science domestique en a, parce que son objet est tout différent. Ainsi, l’on pourrait fort bien croire à première vue que toute richesse sans exception a nécessairement des limites. Mais les faits sont là pour nous prouver le contraire ; tous les négociants voient s’accroître leur argent sans aucun terme.
Ces deux espèces si différentes d’acquisition, employant le même fonds qu’elles recherchent toutes deux également, quoique dans des vues bien diverses, l’une ayant un tout autre but que l’accroissement indéfini de l’argent, qui est l’unique objet de l’autre, cette ressemblance a fait croire à bien des gens que la science domestique avait aussi la même portée; et ils se persuadent fermement qu’il faut à tout prix conserver ou augmenter à l’infini la somme d’argent qu’on possède.  § 19. Pour en venir là, il faut être préoccupé uniquement du soin de vivre, sans songer à vivre comme on le doit. [1258a] Le désir de la vie n’ayant pas de bornes, on est directement porté à désirer, pour le satisfaire, des moyens qui n’en ont pas davantage. Ceux-là mêmes qui s’attachent à vivre sagement recherchent aussi des jouissances corporelles ; et comme la propriété semble encore assurer ces jouissances, tous les soins des hommes se portent à amasser du bien ; de là, naît cette seconde branche d’acquisition dont je parle. Le plaisir ayant absolument besoin d’une excessive abondance, on cherche tous les moyens qui peuvent la procurer. Quand on ne peut les trouver dans les acquisitions naturelles, on les demande ailleurs ; et l’on applique ses facultés à des usages que la nature ne leur destinait pas. § 20. Ainsi, faire de l’argent n’est pas l’objet du courage, qui ne doit nous donner qu’une mâle assurance ; ce n’est pas non plus l’objet de l’art militaire ni de la médecine, qui doivent nous donner, l’un la victoire, l’autre la santé ; et cependant, on ne fait de toutes ces professions qu’une affaire d’argent, comme si c’était là leur but propre et que tout en elles dût viser à atteindre ce but.
Voilà donc ce que j’avais à dire sur les divers moyens d’acquérir le superflu ; j’ai fait voir ce que sont ces moyens, et comment ils peuvent nous devenir un réel besoin. Quant à l’art de la véritable et nécessaire richesse, j’ai montré qu’il était tout différent de celui-là ; qu’il n’était que l’économie naturelle, uniquement occupée du soin de la subsistance ; art non pas infini comme l’autre, mais ayant au contraire des limites positives.
§ 21. Ceci rend parfaitement claire la question que nous nous étions d’abord posée, à savoir si l’acquisition des biens est ou non l’affaire du chef de famille et du chef de l’État. Il est vrai qu’il faut toujours supposer la préexistence de ces biens. Ainsi, la politique même ne fait pas les hommes ; elle les prend tels que la nature les lui donne, et elle en use. De même, c’est à la nature de nous fournir les premiers aliments, qu’ils viennent de la terre, de la mer, ou de toute autre source ; c’est ensuite au chef de famille de disposer de ces dons comme il convient de le faire ; c’est ainsi que le fabricant ne crée pas la laine ; mais il doit savoir l’employer, en distinguer les qualités et les défauts, et connaître celle qui peut servir et celle qui ne le peut pas.
§ 22. On pourrait demander encore pourquoi, tandis que l’acquisition des biens fait partie du gouvernement domestique, la médecine lui est étrangère, bien que les membres de la famille aient besoin de santé tout autant que de nourriture, ou de tel autre objet indispensable pour vivre. En voici la raison : si d’un côté le chef de famille et le chef de l’État doivent s’occuper de la santé de leurs administrés, d’un autre côté, ce soin regarde, non point eux, mais le médecin. De même, les biens de la famille, jusqu’à certain point, concernent son chef, et, jusqu’à certain point, concernent non pas lui, mais la nature qui doit les fournir. C’est exclusivement à la nature, je le répète, de donner le premier fonds. C’est à la nature d’assurer la nourriture à l’être qu’elle crée ; et, en effet, tout être reçoit les premiers aliments de celui qui lui transmet la vie. Voilà aussi pourquoi les fruits et les animaux forment un fonds naturel que tous les hommes savent exploiter.
§ 23. L’acquisition des biens étant double, comme nous l’avons vu, c’est-à-dire à la fois commerciale et domestique, celle-ci nécessaire et estimée à bon droit, celle-là dédaignée [1258b] non moins justement comme n’étant pas naturelle, et ne résultant que du colportage des objets, on a surtout raison d’exécrer l’usure, parce qu’elle est un mode d’acquisition né de l’argent lui-même, et ne lui donnant pas la destination pour laquelle on l’avait créé. L’argent ne devait servir qu’à l’échange; et l’intérêt qu’on en tire le multiplie lui-même, comme l’indique assez le nom que lui donne la langue grecque. ( Tokoi, tikto, enfants, petits, fruits…Theo Tokoi…)
Les pères ici sont absolument semblables aux enfants. L’intérêt est de l’argent issu d’argent, et c’est de toutes les acquisitions celle qui est la plus contraire à la nature.
 

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